Agir collectif et culture partagée

mardi, novembre 01, 2011

Chambre d'écoute # 28 DJ Culture 2/ Un nouvel hommage aux dancefloors


"Nos civilisations qu'on appelle industrielles ne connaissent apparemment pas la fête"
Jean Duvignaud

RED/Laboratoire Pédagogique vous convie à la prochaine chambre d'écoute qui aura lieu le jeudi 24 novembre entre 19h30 et 24h30 à Congrès.
En effet, il s'agit d'une nouvelle édition de nos chambres d'écoute dansantes (un hommage aux dancefloors). Les cinq DJs invités auront chacun 1 heure pour présenter leur sélection de morceaux dansants et/ou qui parlent du dancefloor. Les notices seront projetées sur écran et vous pourrez danser en lisant (ou le contraire). Une afterwork party d'un autre type !
François (aka Space Cookie), Thibaut, Julien (aka DJ Sorg) et Martin und Sabine ont déjà confirmé leur participation..

L'entrée est fixée à 5 euros. Merci de relayer cette invitation !
Adresse : Congrès, 40 blvd Pacheco à 1000 Bruxelles (descendre les escaliers et chercher la buvette).

L'équipe de RED

chambre d’écoute
la playlist argumentée à écouter de façon collective

Chambre d'écoute # 27 > Tracklist

Du doigté/La harpe et l’accordéon au formet pop (série instruments)

Quelle idée saugrenue d’associer harpe et accordéon dans une même chambre d’écoute ! Tant qu’on y est, pourquoi pas clavecin et harmonica, ou violoncelle et bongo ? Et comment les décliner au format pop ? Telles ont été mes premières réflexions à la lecture du thème proposé par Axel. Mais à l’expérience, le choix s’est avéré très fécond et passionnant. Ces deux instruments ont une connotation assez précise et plutôt antagoniste : la harpe incarne la préciosité et la musique classique tandis que l’accordéon nous renvoie aux musiques folkloriques (pas une seule à travers le monde qui ne l’utilise, de la musette à la cumbia en passant par les musiques tziganes ou klezmer) et aux bals populaires. L’idée a été ici de proposer des musiques dans lesquels ces instruments sont utilisés dans des contextes sonores inhabituels, d’une manière qui fait voler en éclat les stéréotypes qu’ils pourraient véhiculer.
François

Chambre d’écoute # 27 : Tracklist

Proposition d’Axel

1/GusGus Selfoss (Kompakt, 2011)
Sur le tout nouvel album de ce groupe islandais (on a déjà passé des morceaux de ce collectif aux Chambres d’écoute), on trouve des incursions d’accordéon. Pour vous ce soir (et pour éviter les redites), je suis allé voir sur Wikipédia et j’ai appris, entre autres choses, d’où venait leur nom : apparemment il vient d’un film de Fassbinder (Tous les autres s’appellent Ali) où l’on trouve une femme qui prépare du couscous pour son amant. Elle prononce gus gus et pour les membres du groupe, c’est une référence sexuelle. La référence au cinéma s’impose car ce collectif était à la base une association de vidéastes et de cinéastes. Il faudra attendre 1995 pour qu’ils passent à la musique. Après leur troisième album, le bras cinéma de Gus Gus se sépare pour former la boîte de production Celebrator.
Pour la musique de ce groupe, j’ai envie d’inventer un genre (mais peut-être l’étiquette existe-t-elle déjà … peu importe) : la coldtronica ou une musique éléctronique froide. Mais avec GusGus froid peut signifier dansant. Je me pose deux questions à leur égard : dans la tête des créateurs, que se passe-t-il pour qu’ils décident d’intégrer un instrument comme l’accordéon dans des compositions éléctroniques ? Deuxième question : comment font-ils pour être si bons ? Des nappes de synthé, des boucles de basses dont l’intensité augmente jusqu’à vous submerger … des vocals accrocheurs quoique mystérieux… A voir en concert absolument ! A ce stade-ci de votre écoute, vous commencez à vous dire : « mais où est l’accordéon ? » Pas de panique, il arrive.

2/Carol Emanuel Singing sands (Evva, 1995)
Sur le très bel album Tops of Trees, la jeune harpiste (fraîchement diplômée du California Institute of the Arts) reprend des classiques de la scène underground new-yorkaise (Lurie, Zorn, Frisell, etc.) mais en mettant l’harpe à l’honneur. Je vous propose son interprétation du Singing Sands de Guy Klucevsek parcequ’il mélange intimement les deux instruments à l’honneur ce soir : outre la harpe de Carol Emanuel, il y a l’accordéon de Guy Klucevsek et le violon de Mark Feldman. Dans les liner notes, cette belle jeune femme raconte comment elle a toujours été frustrée de devoir jouer les morceaux. Par John Zorn, elle a rencontré tous les compositeurs de cet album auxquels elle a demandé d’écrire pour la harpe.

3/Kimmo Pohjonen Loska (Rockadillo Records, 2001)
Attention ce gars est fou ! Si son disque ne suffisait pas, j’ai eu la chance de le voir (mais aussi et surtout de l’entendre) aux Halles de Schaerbeek il y a plus de 10 ans.
Tous les sons de ce disque sont produits par Kimmo avec sa bouche et son accordéon. Il faut néanmoins ajouter que son comparse Samuli Kosminen les retravaille au sampler. Le résultat est étonnant. L’homme est spectacle. Les sons altérés gardent la mélancolie inhérente à l’instrument.

4/Renata Przemyk Nie Zginiesz(Columbia, 1999)
Découverte lors d’un voyage à Cracovie, je suis très vite tombé sous le charme de la belle Renata. Pour elle l’accordéon est comme une seconde peau, un vêtement (sur son album Tylko Kobieta, elle est uniquement vêtue de son accordéon). En deux voyages, j’avais acheté toute sa discographie. Pour Nie Zginiesz (issu de son album Hormon), sa musique se mélange à de véritables influences new-wave (nous sommes proches de Cure) tout en gardant son côté « europe centrale ». L’accordéon se fait plus discret mais il souligne toute la mélancolie qui se dégage de la musique de Renata. Ecoutez le CD reçu ce soir quelques fois et vous vous surprendrez à chanter avec Renata. Le refrain est lancinant (ce semble avoir été inventé pour l’occasion).

5/Zeena Parkins & Ikue Mori Jezebel (Mego, 2004)
Sur la très pointue écurie Mego (juste avant que la firme autrichienne se rebaptise Editions Mego), on trouve ce CD intriguant Phantom Orchard. Cette musique unique est le fruit de la collaboration entre deux grandes dames de la musique électro-acoustique : Zeena vient de New-York et Ikue de Tokyo (comme son nom le laisse supposer). Alors que Zeena s’occupe des cordes (harpe acoustique et électrique, piano) et autres cordes frappées (du piano ou encore des claviers plus ou moins ancestraux), Ikue se fait l’alchimiste de service en ajoutant çà et là des touches d’électronique. Cet axe (New-York/Tokyo/Vienne) illustre bien la mondialisation en cours dans le domaine des musiques confidentielles : les artistes qui s’adressent à une poignée d’auditeurs communiquent par les voies modernes et s’assurent une plus grande audience. Ce soir, vous faites partie de cette communauté. Jezebel est à la fois délicat et dérangeant. Je vous laisse imaginer dans quelle mesure.

6/Joanna Newsom The Book of Right-on (Drag City, 2004)
Voici une jeune artiste venue de nulle part avec un projet un peu fou : faire un album quasi toute seule autour de son instrument de prédilection (la harpe donc) et le proposer à un label assez rock (via son propre réseau de contact : la belle est amie de Bonnie Prince Billy). La voix peut énerver certains mais le morceau que nous vous proposons ce soir est une petite perle pop. La harpe est utilisée à la fois comme basse et comme harpe : le tout sonne assez folk (impression confirmée par la pochette brodée). Joanna nous fait littéralement pénétrer dans son univers poétique et onirique. Après cet album, elle s’est embarquée dans des projets très ambitieux (et très coûteux) : mêler sa harpe avec un orchestre. Une palette encore plus riche mais une perte dans la profondeur du son.

7/Nancy Elisabeth Coriander (Leaf, 2007)
Cette jeune artiste anglaise (elle aura bientôt 28 ans) œuvre dans le même domaine que Joanna et nous donnait le choix ce soir entre plusieurs possibilités de contributions : on trouve des perles avec de la harpe et d’autres avec de l’accordéon. Le choix fut dur mais on a opté finalement pour cette ballade à l’accordéon car le début est ravageur. L’approche de Nancy est, disons, « champêtre ». Il y a la campagne anglaise en toile de fond, du land art (la BO d’une marche de Richard Long). Coriander est tiré de son premier véritable album Battle & Victory, qui a été acclamé par la critique. Avant cela, elle s’autoproduisait et faisait partie de la scène folk de Wigan, le petit bled du Lancashire d’où elle est originaire. Elle joue différents instruments : voix, guitare, harpe, khim (instrument traditionnel thaïlandais) et a étudié au Liverpool Institute for Performing Arts (rédigé en partie avec l’aide de Wikipédia).

Proposition de François

8/Flying Lotus Clock Catcher (Harp Arrangement) (Warp, 2011)
Flying Lotus pratique un mélange de hip-hop et de musique électronique, qui s’inspire autant des musiques expérimentales que du jazz cosmique de Alice Coltrane et de Sun Ra. Sur son album Cosmogramma (Warp, 2010), il fait appel à la harpiste Rebekah Raff sur plusieurs morceaux (dont le bien nommé « Auntie’s Harp »). Cette collaboration s’inspire directement de la musique d’Alice Coltrane, l’une des rares harpistes de jazz. Clock Catcher est issu d’un album reprenant des versions alternatives des morceaux de Cosmogramma, cette version opérant un dépouillement des arrangements, mettant en valeur la harpe de Rebekah Raff.

9/Morgan Packard Airships Fill the Sky (Anticipate Recordings, 2007)
Morgan Packard s’emploie à intégrer dans sa musique électronique des instruments acoustiques : piano, saxophone et…accordéon. Sur une boucle rythmique électro, c’est tout un monde souterrain qui émerge fait de nappes d’accordéon, de petits bruits étranges, de percussions miniatures.

10/Amon Tobin Horsefish (Ninja Tune, 2007)
Autre habitué de nos programmations, Amon Tobin est l’un des artistes les plus passionnants de la dernière décennie. Avec l’album Foley Room (2007) il s’aventurait du côté de la musique contemporaine et des musiques concrètes, délaissant quelque peu les samples pour privilégier l’utilisation d’instruments réels, dont la harpe. Horsefish débute sur des sons de harpe évoquant le rêve et le merveilleux, puis progressivement le morceau dérive vers des climats plus inquiétants, évoquant par exemple la musique de Bernard Herrmann pour le film Vertigo d’Alfred Hitchcock.

11/Siouxsie & The Banshees Peek-A-Boo (Polydor, 1988)
Voici un morceau qui incarne parfaitement le mariage entre pop et accordéon, notre thème du jour. Fin des années 80, le groupe Siouxsie & the Banshees tourne le dos au punk-rock gothique de ses débuts pour donner à sa musique des accents beaucoup plus pop. Avec son accordéon lancinant et ses cuivres dissonants, Peek-A-Boo (nom donné à un jeux d’enfants) nous fait pénétrer dans une ambiance de cabaret déglingué, prolongeant les expérimentations exotiques faites avec le projet parallèle de Siouxsie, The Creatures, qui intégrait déjà de nombreux instruments s’écartant résolument de l’orthodoxie rock.

12/PJ Harvey Broken Harp (Island Records, 2007)
Artiste aventureuse se remettant sans cesse en question, PJ Harvey a commencé à intégrer une harpe dans sa musique et lors de ses récents concerts, elle se produit avec une « harpe de poche ». La « harpe brisée » du titre évoque tout d’abord bien sûr l’instrument qui accompagne de manière dépouillée la voix nue de PJ Harvey mais aussi de manière plus métaphorique les états d’âme que révèlent les paroles de la chanson : « Please don't reproach me/For, for how empty/My life has become ».

13/Elizabeth Fraser Moses (Rough Trade, 2009)
Liz Fraser est principalement connue pour avoir été la chanteuse du groupe Cocteau Twins, fleuron de la new wave romantique du label 4AD au début des années 80. On la retrouvera aussi au sein de This Mortal Coil (super-groupe monté par Ivo Watts, le patron de 4AD) pour une reprise de Song to the Siren devenue culte. Plus tard, elle sera invitée sur l’album Mezzanine de Massive Attack. Depuis quelques années son timbre de voix si particulier s’est fait plus rare, ne revenant que pour un single isolé, ce beau Moses qui explore des nouveaux territoires musicaux, intégrant un accordéon balkanique conjugué à des rythmes dub.

14/Four Tet Untangle (Domino Records, 2001)
On a déjà fréquemment rencontré Four Tet lors de ces chambres d’écoute, et vu qu’à ma connaissance il est l’un des premiers à avoir intégré régulièrement de la harpe dans la musique électronique, sa présence s’imposait une fois de plus. Untangle est une merveille de minimalisme : un beat électronique, quelques bidouillages et cette harpe lumineuse qui emmène l’auditeur vers des terres inexplorées.



Merci à vous pour votre présence et votre écoute. Rendez-vous prochainement pour de nouvelles aventures sonores et pédagogiques…

dimanche, août 21, 2011

Chambre d'écoute # 26 Du Doigté/la harpe et l'accordéon au format pop (série instruments)

La prochaine chambred d'écoute aura lieu le mercredi 14 septembre à Congrès dans le cadre de l'événement RED/Buvette (ou la présentation par RED/Laboratoire Pédagogique de son programme pour l'année 2010-2011).
A 19 heures : présentation du programme de RED, suivie d'un drink
A 20h45 : chambre d'écoute
Pour réserver : un mail à l'adresse suivante apleeck@base.be ou un appel sur mon gsm au 0494/418.465...

Chambre d'écoute # 25 Tracklist

« Tout est lent, brumeux (…) Puis l’humeur passe. Le bruit et la hâte et le flou reviennent et tu te réintroduis dans ta vie, avec ce poids douloureux dans la poitrine. »

Don Delillo, Body Art

Chambre d’écoute # 25 : New Weird America/Les USA, un territoire qui fait à nouveau rêver (série Territoires Imaginaires)

« Bonjour je suis Barack Obama et je suis la personne qui a fait mettre une cravate à Mark Zuckerberg ». Nous sommes fin avril et Barack Obama doit présenter un discours très attendu censé relancer l’économie américaine. Il choisit un symbole : le siège de Facebook. Un peu plus de deux ans après l’investiture d’Obama, que reste-t-il du « Yes, we can ! » ? Doit-on se contenter de Facebook ? (ou de la mort de Ben Laden ?)
Ce soir, nous n’allons pas vraiment proposer des musiques pour illustrer cette constatation qui a des allures de déception. Le titre de cette chambre d’écoute est à prendre à la lettre : une autre amérique existe. Weird signifie « étrange ». Les USA sont un territoire qui fait rêver : grands espaces, grandes mégalopoles, centres névralgiques de la culture et de l’économie, etc… C’est juste que durant les années de Georges W Bush, on avait pas envie d’y aller. Aujourd’hui, tout n’est pas rose au pays de l’oncle Sam mais certains nuages très menaçants sont partis.
Donc ce soir, il sera question de géographie, de culture underground. De cerner en 45 minutes, une scène bouillonante et multiforme. Merci à Congrès et à vous…

Chambre d’écoute # 25 : Tracklist

1/310 Get Outta Here Reagan (Leaf 1998)
Un critique de la revue The Wire a parlé de cette technique d’enregistrement comme d’audio polaroïd. Les membres de ce groupe sont séparés par des milliers de kilomètres. L’un collecte des sons, il les envoie à l’autre qui les empile par couches. Au départ, des sons, des samples, des ambiances sonores (mais aussi photographiques, voir la pochette). De cette palette, les musiciens, tels des Luc Tuymans du son, brossent un tableau singulier de la culture américaine. Chaque morceau est une petite miniature avec un titre qu sonne comme la légende d’une photo. Ce morceau-ci nous servira de point de départ et de perspective historique. Certains d’entre-nous avaient l’âge de comprendre la politique quand l’ancienne star de ciné Ronald Reagan commençait de changer la face du monde. Après, les Bush ont creusé le sillon jusqu’au 9/11. Get outta here Reagan…

2/Haunted House Only when you sleep (Erstwhile Records, 1999)
On commence avec un morceau qui place d’emblée le curseur dans le noir. Ces accords sombres de guitare sont signés Loren Mazzacane Connors. Cet homme est un des maîtres incontestés de ce genre de musique. La guitare installe un climat qui suinte le malaise. Le persian daf de Neel Murgai complète le tableau en déstabilisant les accords. Ce CD est la deuxième parution d’un catalogue qui allait faire date dans l’histoire de la musique électro-accoustique improvisée. Jon Abbey, le boss d’Erstwhile, dépense sans doute un héritage à publier des disques quasi exclusivement par internet à une poignée de fans de par le monde. Une fois par an, il rassemble quelques artistes de son écurie pour une série de soirée/confrontations. Son festival Amplify est passé par Cologne. Cette soirée fût le point de départ de ma passion pour cette ville. La voix torturée qui vous ne tarderai pas à entendre est celle de Suzanne Langille.

3/Earth Mirage (Southern Lord Recordings, 2005)
Earth est le projet un peu fou de Dylan Carlson. Kurt Cobain, le défunt chanteur du band planétaire Nirvana, a été batteur de cette formation qui propose un rock expérimental essentiellement orienté vers la guitare. Earth est un groupe culte, adulé par tout ce que la terre compte de fans de néo-métal, de métal-expérimental (cfr. Notre future chambre d’écoute Expéri-métal : deux mondes que tout opposent ?) La richesse de Dylan Carlson est de mélanger différentes esthétiques : la country/western ose la pose epic rock. C’est Stephen 0’Malley (le boss du label et l’homme derrière le projet Sunn o))) qui a convaincu Dylan de reprendre du service pour le plus grand bonheur de notre imaginaire qui trouve de cette façon sa plus belle bande-son pour une visite des Grands Espaces.

4/Kevin Yost Road less traveled (Distance 2001)
Kevin Yost est un DJ connu et respecté par tous ceux qui aiment danser. Il est un pionnier du mélange house-jazz. Sur ce morceau, il nous emmène sur ces routes moins fréquentées du paysage américain. C’est le moment de casser le rythme dans lequel s’installait doucement cette chambre d’écoute : le blues poisseux. Votre pied devient comme le métronome qui accompagne la vue sans cesse renouvelée (mais toujours pareille) des bornes kilométriques… La route, c’est le rêve américain vu à partir d’un symbole : la voiture. Ces grosses voitures, ridiculement voraces mais tellement intéressantes dans leurs formes et investies par nos imaginaires : le cuir, la radio, la boîte à gants, les insignes de marques…

5/Morel Dreaming of L.A. (Yoshitoshi 2001)
Comme Deep Dish (dont il est souvent la voix), Richard Morel officie à partir de Washington DC. Cette plage house est issue de l’album Queen of the highway et symbolise l’appel de l’ouest. C’est deep, c’est house, c’est le son des dancefloors américains. Les paroles de cet homme (oui je sais celle-ci est plutôt instrumentale) parlent d’un certain malaise américain : social, politique, ethnique,… La musique est comme la bande-son d’un road movie. Les images défilent, pixellisées par les écrans de télévisions et de surveillance.

6/Matthew Dear You put a smell on me (Ghostly International, 2010)
Né au Texas, Matthew Dear a assez vite foutu le camp au Michigan. Là il fonde Ghostly International avec un camarade avec lequel il partage sa passion pour la musique électronique. Sa musique est une fusion habile de la pop et de la techno minimale. Matthew est beau, il a du style. Il illuminait la Rotonde lors de son dernier passage. Moi, j’avais un ticket pour Gonjasuffi : une arnaque montée en épingle (je parle de sa prestation scènique pas de ses disques). Je quitte la salle et je négocie mon entrée dans l’autre salle et je découbre Matthew (que je ne connaissais que de nom). J’achète le disque. Pour la petite histoire, ce morceau faisait partie de ma sélection pour la chambre d’écoute Dance ; sélection qui est passée à la trappe car mon ampli a rendu l’âme. Je prends ma vengeance.
Le titre est un joli jeu de mots entre « jetter un sort » (spell)(parole classique du blues-rock des débuts) et l’odeur (smell) que le bon DJ vous colle à la peau en vous faisant danser. La musique de Matthew est intemporelle : on dirait un vieux Simple Minds, un vieux Talking Heads mais revisité par 2010…

7/David Thomas & Two Pale Boys Highway 61 revisited (Cooking Vinyl 1996)
David Thomas est la tête pensante du groupe Pere Ubu. Légendaire, ce groupe a ouvert la voie/voix à toute une culture alternative américaine dans les années 80. David Thomas tourne encore fréquemment. Sur l’album Erewhon, il pose la questions des endroits imaginaires (tout à fait à sa place dans cette chambre d’écoute qui appartient à la série Territoires Imaginaires). Sur fond de vraies/fausses cartes, il écrit des chansons sur des lieux utopiques. « You know how it is. Somebody finds a place. Words get round. Everybody moves in. » L’utopie précède l’installation. Le rêve américain est une utopie réelle, qui échappe au contrôle de ses créateurs.

8/Harry Partch There are rides on the highway at Green River (from U.S. Highball : a musical account of Slim’s Transcontinental hobo trip interprété par le Kronos Quartet et la voix de David Barron) (Nonesuch 2003)
En septembre 1941, le compositeur Harry Partch quittait son petit chalet de Carmel en Californie pour se diriger vers Chicago. Il voulait réagir à une situation qui commençait à devenir préoccupante : bien qu’au milieu d’une nature foisonnante, il devenait peu à peu improductif. Il entreprit ce voyage en utilisant des trains de marchandises, comme un hobo (figure emblématique de Kerouac). Cette partition est le compte-rendu musical de cette aventure.

9/A Small Good Thing presents Slim Westerns Saloon Dreams (Leaf 2002)
Slim Westerns, c’est une série de « vignettes » qui captent de façon imaginaire des ambiances américaines. Il y a eu plusieurs volumes (publiés à l’origine par Soleilmoon Recordings, réédités par le soin du label Leaf). A l’époque où la bande-son imaginaire faisait fureur, Mark Sedgwick, Tom Fazzini et Andrew Hulme publie ces petites pièces fines qui explorent une sorte de déjà-vu sonore. La langue anglaise parle d’Americana (objets ou documents appartenant à l’héritage culturel américain dixit mon Robert & Collins). Saloon Dreams, c’est le cow-boy du cliché qui se rend compte qu’il est une icône, un symbole, une mythologie (au sens de Barthes). Il y a un regard critique sur l’imaginaire. Un décalage.

10/Here We Go Magic Everything’s big (Western Vinyl 2008)
Découvert au Botanique il y a peu, le groupe de Luke Temple étonne par son apparente simplicité. Une simplicité qui, écoutée attentivement, révèle une véritable richesse sonore. Everything’s big évoque un monde parfait. Où la grandeur fait office de mesure étalon. On pense aux buildings, aux voitures, aux portions de nourriture, aux kilos en trop, aux limousines (qui commencent à faire leur parade pornographique jusque chez nous).
On a dit de Luke qu’il était un peu comme un Paul Simon sous acide (même si ce n’est pas apparent sur ce morceau). Il mélange les genres, les timbres et sa voix gentiment féminine habille ses mélodies d’une certaine pudeur. Il vous faudra peut-être plusieurs écoutes pour rentrer bien dans le morceau (d’où l’intérêt d’écouter le CD).

11/Rilo Kiley Spectacular views (Saddle Creek 2002)
Enregistré au cœur du Nebraska par l’équipe de la charmante Jenny Lewis, ce Spectacular views est une ode à l’horizontalité des territoires. Ceux qui ont parcourru le pays de l’oncle Sam, ceux qui ont lu On the Road de Kerouac le savent : on a vite le souffle coupé sur les routes américaines. Fermez les yeux et imaginez une route sans fin ! « Indifferent but distanced perfectly projected endlessly it’s so fucking beautiful » comme le crie Jenny à tous ceux qui veulent l’entendre. Le texte rend aussi hommage aux pierres qui attendent, qui témoignent d’une histoire qui s’écrit en millénaires : le temps long des sédiments. On en ressort avec un sentiment de plénitude : « You never knew why you felt so good in the strangest of places ».
Un peu de pop-rock aux chambres d’écoute, cela fait du bien. Votre écoute attentive est recompensée.

12/Magic Markers 7/23 (Drag City Records 2009)
Avant « Balf Quarry », les disques de Magic Markers semblaient toujours avoir été enregistré à l’aide d’un répondeur téléphonique. Ils incarnaient une certaine aile extrême de la musique Low-Fi. C’est qu’entre-temps Elisa Ambrogio a rencontré Ben Chasny, l’homme derrière le légendaire projet néo-folk Six Organs Of Admittance. Ils ont croisé leurs pratiques, leurs mains et Ben lui a dégotté un deal avec le très bon label Drag City. Le résultat est un album au son plus propre (la belle s’est calmée) mais qui dérange encore. Ils étaient invité au festival All Tomorrow’s Parties à Minehead (ce festival qui se passe dans un camp de vacances au bord des plages anglaises), l’édition pour laquelle c’est Sonic Youth qui signait la programmation. Balf Quarry est une petite bourgade dans le Connecticut. Une zone minière.

Prochaines chambres d’écoute

En 2010

Le jeudi 7 juillet: # 29 : Bidonville, l’autre ville (pour accompagner l’exposition du même nom, dans le cadre du festival Dièse à Dijon)

Le mercredi 14 septembre : # 26 : Du doigté/la harpe et l’accordéon au format pop (série Instruments) à Congrès

Le mercredi 16 novembre : # 27 : Green Blue Red/Hommage à Elsworth Kelly (série Arts & Plastiques) avec une mini-conférence

Décembre : # 28 : Yougoslavie, années 90 (pour les 20 ans de l’éclatement de la Yougoslavie- titre provisoire) à l’ULB (série Histoire)


Chambre d'écoute # 25 Tracklist

Il s’agit de restaurer cette continuité entre les formes raffinées et plus intenses de l’expérience que sont les œuvres d’art et les actions, soufrances et événements quotidiens[1]

L’un des sens du mot abstrait est « qui ne représente pas le monde sensible (réel ou imaginaire) ; qui utilise la matière , la ligne et la couleur pour elles-mêmes » (Le Petit Robert). Je me base sur cette définition pour la musique proposée ce soir. Ce n’est sans doute pas la seule définition possible du hip hop abstrait. Le hip hop de cette chambre d’écoute ne parle pas du réel. Il utilise la matière sonore pour elle-même. La posture éthique et graphique emprunte au hip hop, la grammaire sonore relève, elle, de la musique électronique. A l’heure où j’écris ces lignes, je n’ai aucune idée comment François a interprété la consigne. Nous aurons des surprises. Merci à tous d’être là ce soir et bonne écoute.
Chambre d’ écoute # 24 Tracklist

>>>La proposition d’Axel et Sabine

1/ eRikm/dieb13 Chaos club (Erstwhile 2007)
Je parlais dans l’introduction à cette soirée de matière sonore. Nous voici, avec la « musique » d’eRikm et de dieb13, au cœur du sujet. Ces deux artistes sont des « turntablists ». Cela signifie qu’il explorent musicalement et conceptuellement les possibilités de la bonne vieille platine pour les vinyls. Le disque vinyl est ici soumis à un traitement qui peut prendre de multiples formes : scratch, intervention sur le disque pour en modifier la texture (en ajoutant de la peinture, des collants ; ce qui a pour effet de faire sauter l’aiguille)… Un set de turntablist relève du domaine artistique de la performance. Les représentants plus connus de cette discipline à la frontière de l’art sonore et des arts plastiques sont Christian Marclay, DJ Spookie. eRikm (de Marseille) et dieb13 (de l’Autriche) font partie d’une nouvelle vague.

2/ La Funk Mob Breaking boundaries, messing up heads (Casse les frontières, fou les têtes en l’air) (Mo Wax 1994)
Nous sommes en 1994. Le label anglais Mo Wax a commencé de faire tomber les barrières entre les musiques. Les prémisses d’ un hip hop abstrait sont posées. Le boss du label, James Lavelle, parle de Abstract Musical Science. Il invite le collectif français La Funk Mob (au sein duquel on retrouve Boombass et Zdar) à participer à un projet qui fera date : mélanger la crème de l’électro et du hip hop. Sont ainsi embrigadés Carl Craig, Richie Hawtin, Nightmares on Wax pour un double maxi 10 pouces de légende. Je vous propose le mix de Richie Hawtin (aka Plastikman). L’esthétique de Mo Wax est largement inspirée du monde du graffiti. James Lavelle continue son voyage sonore avec son projet UNKLE.

3/ The Golden Palominos Ride (Restless 1996)
L’histoire de ce groupe à geométrie et personnel variables remonte à 1981. Anton Fier en est la colonne vertébrale. Parmi les membre éminents, on peut recenser Arto Lindsay, Bill Laswell. Sur l’album Dead Inside (dont est issu Ride), c’est Nicole Blackman qui assure les voix et l’écriture des textes. Nicole déclame sa poésie sur une matière sonore riche, le flow vocal est constant. L’histoire est glauque comme un film de David Lynch. C’est le rêve américain passé à la moulinette du film noir. Parmi ce flow, je cite une phrase qui résonne dans ma tête comme une ode à époque : « If you love something, chances are you can’t afford it ». (Morceau proposé par Sabine Ringelheim, merci à elle).

4/ Alias w/ Markus Acher (The Notwist) Unseen sights (Anticon 2004)
Une collaboration improbable entre Alias (un des fers de lance du label Anticon, un label de hip hop qui s’est toujours atelé à mélanger les grammaires : rap, pop low-fi, electronica, etc.) et le chanteur du groupe allemand de post-pop The Notwist. Ce morceau parle de la perception des paysages et des souvenirs qui y sont associés. Comme un peintre qui essaie de rendre le foisonnement du réel par touches successives, le duo essaie de dresser une cartographie du réel et des états d’âmes qui y sont associés. La mélancolie pointe son dard et pique la mémoire. Le moindre changement dans la perception influe sur le tableau. (morceau proposé par Sabine)

5/ Daedalus (featuring Paperboy & Taz Arnold) Touchtone (Ninja Tune 2008)
Daedalus est le nom de plume d’Alfred Darlington : un musicien aux multiples talents (il a une formation classique et jazz) issu d’un ménage artistico-psychologique. Il vient de Santa Monica mais a passé une partie de sa jeunesse dans un YMCA à Londres. C’est là qu’il découvre la scène Rave. De retour à la maison, il joue dans différentes formation rock, pop ou encore ska mais s’y sent vite limité… Sa carrière débute doucement au hasard de ses rencontres… L’album dont est tiré cet extrait se nomme Love to make music to (De l’amour pour faire de la musique). J’aime ce titre qui retourne habilement la formule classique (de la musique pour faire l’amour) et qui traduit bien la philosophie de cet homme : je prends, je retourne, je mélange à ma sauce, je surprends en étant là où personne ne m’attend…
Touchtone est un morceau qui mèle savamment la rhétorique du hip hop et la matière sonore de l’electronica. Ce disque est l’aboutissement d’un certain parcours dont il dira : « Ce disque est la mémoire imaginaire d’un temps qui ne fut jamais ». Tout un programme, en somme ! (infos biographiques tirées du site de Ninja Tune).

6/ Common featuring Leatitia Sadier of Stereolab New Wave (MCA Records 2002)
Ici, je comprends le mot abstrait au sens de « rencontre improbable » entre Common (un rappeur dont la production allie classicisme et qualité) et Leatitia Sadier (une grande prêtresse du post-rock infusé par la musique électronique). Le morceau commence avec une mélodie d’orgue (un instrument que l’on retrouve beaucoup dans la musique de Stereolab). Le beat arrive, lourd avec des accords de piano. Ensuite la voix de Common commence son flow. Il parle de bataille, de funk et de punk. Ecoutez les sons à l’arrière-plan : la palette est riche. Le refrain nous fait basculer dans un autre univers sonore. Leatitia parle français et entend casser le flow et le rythme de Common. J’adore ce morceau car il recèle, à mon sens, plein de possibles.

>>>La proposition de François

Apparu au début des années 90, l’abstract hip hop se caractérise par un tempo lent, des atmosphères cinématographiques, des scratch langoureux, des extraits de dialogues, des influences jazz et de musiques de films et une propension certaine à la mélancolie. Voici quelques morceaux emblématiques du genre.

1/ DJ Shadow In Flux (Edit) (Mo Wax 1993)
DJ Shadow est considéré comme l’un des précurseurs de l’abstract hip-hop, et le morceau In-Flux, paru sur le légendaire (et défunt) label Mo Wax, a donné lieu à l’invention du concept de « trip-hop » par le journaliste Andy Pemberton (Mix Mag), Ce dernier soulignait l’innovation de ce titre, mélangeant des bribes de dialogues samplés, des cordes épiques, des sons bizarres, un parfum jazz, rompant avec la tradition du hip hop.

2/ DJ Cam Innervisions (Inflamable Records 1996)
Suivant un premier maxi très justement intitulé « Abstract Hiphop Volume 1 », DJ Cam sort plusieurs albums qui implantent le genre en France. Son second album Substances, dont est issu « Innervisions », est emprunt d’influences jazz et indiennes. (Artiste proposé conjointement par François et Sabine)

3/ Nostalgia 77 Processional (Tru Thoughts 2004)
Avant de se tourner vers une musique davantage soul-jazz (avec notamment l’apport de la chanteuse Alice Russel), le groupe britannique Nostalgia 77 pratiquait sur son premier album Songs For My Funeral une musique atmosphérique naviguant entre abstract hip hop, jazz et spleen.

4/ Sixtoo Incidental 1 (Bully Records 2006)
Autre figure emblématique du hip hop instrumental, l’artiste canadien Sixtoo a enregistré ce morceau, paru sur un double 45 tours, comme bande originale d’un film documentaire sur l’art du graffiti. Beat lancinant, boucle de piano debussienne, minimalisme, toute la quintessence de l’abstract hip hop.

5/ Amon Tobin The Killer’s Vanilla (Ninja Tune 2007)
Au départ d’une musique mêlant trip-hop, drum and bass, jazz et musique brésilienne sur ses premiers albums, Amon Tobin a construit un univers de plus en plus complexe, sombre et expérimental, s’imprégnant de musiques contemporaines et de musiques concrètes, influences majeures de son dernier opus en date, Foley Room. Sur ce morceau, il collabore avec le légendaire quatuor à cordes Kronos Quartet, connu pour son ouverture musicale, enregistrant tout aussi bien Alban Berg et Philip Glass que Astor Piazzola ou des compositeurs indiens ou africains.

6/ Carlo Cossette 1084 Jours (Bully Records 2005)
Peu d’informations précises sur ce morceau, paru sur un 45 t assez confidentiel en 2005, et sur l’artiste. Il suffit de se laisser emporter par l’atmosphère cinématographique et mélancolique qui se dégage de cette plage.


[1] Je mets cette citation en exergue pour le début de cette chambre d’écoute. Je l’emprunte à Dewey J., L’Art comme expérience, Tours, 2006. Dans son introduction à ce livre, Richard Shusterman compare l’art postmoderne et le rap (cité par Formis B., Esthétique de la vie ordinaire, Paris, 2010)

Chambre d'écoute # 23 Tracklist

Le Transport des voix ou l’absence conjurée

Tout d’abord, bienvenue et merci d’être là. Ce soir, vous ne devez pas obligatoirement éteindre vos GSM. Ils peuvent sonner, vibrer, vous pouvez décrocher. Nous célébrons l’objet et ses manifestations, toutes. L’objet nous rend service, nous sauve, nous dérange, nous surveille. Il a beaucoup évolué. Il est technologique. Il change de génération tous les ans.
Nous vous proposons un voyage temporel (très électronique, vous verrez, comme un écho de l’objet en soi) à travers le dispositif téléphonique (formé de deux appareils en communication et d’une kyrielle de services annexes). Merci à Kremi (la charmante responsable de la buvette), à Arnaud (de Congrès) et à François. A vous !

Tracklist :

>>>>>>>>>>Vous avez 1 nouveau message d’Axel

1/ Global Communication 0 54 (Dedicated, 1994)
Avant la mainmise totale d’Internet sur nos consciences et nos temporalités, un groupe révolutionnaire (au nom prémonitoire) mettait en scène cette communication entre les personnes. Pour souligner le caractère global, le duo fait appel à Babel ou la multiplicité des langues humaines. Le logo du groupe mêle habilement le G et le C en une oreille-symbole et pointe le fond du problème : l’écoute. Les auditeurs de ce disque sans titres de chansons (« Use your imagination ! » disaient-ils) étaient invités à communiquer leurs émotions par courrier. En 2011, tout le monde communique ses émotions en temps réel : joie du Web 2.0
Faites-moi plaisir : écrivez-moi une vraie lettre de soutien à l’adresse suivante : Axel Pleeck, 63 rue Alfred Stevens 1020 Bruxelles…

2/ Poulenc-Cocteau La Voix humaine (Julia Migenes/Orchestre National de France dirigé par Georges Prêtre) (Erato/Radio France, 1991)
Sur un texte de Jean Cocteau de 1932 qui met en scène une femme abandonnée par son amant auquel elle téléphone pendant trois quarts d’heure, Francis Poulenc a crée une musique pour orchestre restreint qui ouvre l’acte (unique) par une sonnerie du téléphone (confiée au xylophone) et reflète les émotions succesives de ce long monologue. La Voix humaine fut d’abord jouée à la Piccola Scala de Milan, puis à New-York et Edimbourg. La création française eut lieu le 6 février 1959, dans une mise en scène de Cocteau. C’est un extrait. Je coupe au moment où elle prend un médoc (cela me semble une bonne transition avec notre époque).

3/ Barbara Morgenstern The Operator (Monika Enterprise, 2006)
A l’époque de « La Voix Humaine », les appels téléphoniques transitaient encore par les bons soins de l’opérateur. C’est cette fonction-là que j’entends honorer en faisant appel à la patte électronique de Barbara. Nous avons déjà fait appel à elle. Rappelez-vous, elle officie de Berlin, via le label essentiellement féminin Monika Entreprise. Sous la férule de Gudrun Gut (qui est passée dans ces murs au tout début du projet Congrès), Monika Entreprise trace sa voie entre pop et électro, tout en finesse.
L’opérateur est celui qui assure le lien entre les voix des personnes. Il switche des fiches, connectant et déconnectant, au gré des demandes. A l’époque, un n° de téléphone comportait un indice de lieu… On est loin de tout ça et, en même temps, cela fait encore partie de notre imaginaire collectif…

5/ Faultline Partyline Honey (The Leaf Label, 1999)
Sur le très bon label Leaf (un de mes préférés depuis longtemps), un morceau de Faultline (le nom du projet de David Kosten) qui parle des usages sexuels du téléphone. Toutes les technologies de la communication ont intégré cette dimension libidinale et très rentable. Une « partyline honey » est une personne qui, en échange d’une rémunération, donnera du plaisir oral à une autre personne. On a connu le 3615 Eva, on connaît les webcams, il y a aussi eu les téléphones roses. Sordidement platoniques, ces relations sont ici ramenées à leurs aspects aliénants : « hey girl, what’s your name ? » et la fille de répondre : « One ! ».

6/ Shit Disco The Answering Machine (DFA, 2010)
Sacré « meilleur album électronique » par le quotidien anglais The Guardian, Shit Disco semble être un projet adoubé par James Murphy (membre du LCD Soundsystem et patron du label DFA). Aux commandes un certain Marcus Lambkin. L’influence de Kraftwerk est manifeste (cfr. Infra). Le répondeur fait partie intégrante du dispositif téléphonique : il assure une couverture à nos absences. Aujourd’hui, à l’heure de la portabilité, on parle de boîte vocale ou de messagerie. Conjurer l’absence qu’on vous disait dans l’invitation… La jeune femme qui parle ici sait que le répondeur joue parfois au filtre ! « You got to come and talk to me ! »)

7/ Soulo 24 hours on the phone (Plug Research, 2001)
A l’époque de mes 15-20 ans (c’est-à-dire avant Internet, le GSM et autre Facebook), j’aimais rester longtemps au téléphone. On parlait avec ses amis, on se racontait des trucs sans importance (mais qui nous semblaient fondamentales), on prenait le combiné sur le palier pour éviter les oreilles indiscrètes, on prenait rendez-vous (un rendez-vous qu’il n’était plus possible d’annuler)… C’est cet âge d’or que Soulo (duo californien composé de Nate Flanigan et Shawn King) entend célébrer (c’est du moins mon interprétation). 24 heures on the phone, c’est un rêve… C’est la vie vécue et écoutée par l’Autre… Cet album est produit par John Tejada, une pointure de la musique électronique…

8/ Mateo and Matos Got a message (Glasgow Underground, 1999)
John « Roc » Mateo et Eddie « E-Z » Matos viennent de New-York et font de la House depuis la fin des années 80. Leurs maîtres ont pour noms : Shep Petibone et Tony Humphries. Leurs disques et productions ont ce son caractéristique des dancefloors de la côte est : pas trop rapide, influencé par le disco. Un son qui transpire. Vers la fin des années 90, ils trouvent une maison de disque de l’autre côté de l’Atlantique : le très bon label Glasgow Underground. Got a message parle laconiquement d’un message, ce fameux message que l’on voudrait envoyer à l’âme sœur recontrée sur la piste. Est-il compréhensible ce message ? A-t-on bien noté le numéro de téléphone ? Sinon, ce sera une relation sans lendemain. La boule à facettes, cela rappelle de bons souvenirs à ceux qui ont bravés la neige pour venir danser avec nous lors de notre chambre d’écoute de décembre.






>>>>>>>>>>Vous avez un nouveau message de François

1/ Laurie Anderson O Superman (Edit) (Warner, 1981)
Inspiré d’un opéra de Massenet (Le Cid), ce célèbre morceau a remporté un succès inattendu en 1981 (n° 2 dans les charts britanniques !), compte tenu de son côté franchement expérimental : boucle vocale minimaliste, voix trafiquée au vocoder, paroles obscures. La chanson consiste principalement en un mystérieux dialogue par répondeur téléphonique interposé, entre Laurie et sa mère.

2/ Beastie Boys B-Boys Makin' With The Freak Freak (Intro) (Capitol Records, Grand Royal - 1994)
Une autre histoire de répondeur. Les Beastie Boys ouvrent ce morceau en samplant un message téléphonique adressé à Adam (Horowitz, l’un des membres du groupe) par l’une de ses rencontres, manifestement française. Curieusement, cette intro a été supprimée des exemplaires édités aux Etats-Unis, par crainte semble-t-il de recours de la personne concernée qui n’aurait pas apprécié voir son message intégré à l’album des Beastie Boys… On reparlera un peu plus loin de cette petite intro…

3/ Kraftwerk The Telephone Call (Instrumental Edit) (Kling Klang 1986)
Kraftwerk est l’un des groupes fondamentaux dans l’évolution de la musique électronique et demeure aujourd’hui une référence majeure. Ils ont toujours eu une fascination pour les objets technologiques, qu’ils ont fréquemment intégrés dans les thématiques et les sonorités de leurs morceaux (robot, ordinateur, calculatrice,…). Ils jouent ici avec toute la palette des sons liés à l’univers des téléphones, et soulignent la proximité mais aussi la distance que crée l’usage des télécommunications.

4/ Dimitri From Paris Attente Musicale (Yellow Productions, 1996)
Le téléphone, c’est aussi les musiques que l’on vous impose lorsque l’on vous met en attente de votre correspondant. Dimitri from Paris s’en amuse en parsemant son premier album Sacrebleu d’interludes musicaux évoquant la musique lounge des années 60.

5/ The Penguin Cafe Orchestra Telephone and Rubber Band (Virgin, 1981) (Type, 2006)
The Penguin Cafe Orchestra a été fondé dans les années 70 par Simon Jeffes, en vue de dépasser les canons des musiques classique et rock et développer une approche plus libre et expérimentale, inspirée des musiques traditionnelles et empreinte de minimalisme. « Telephone and Rubber Band » est composé d’une boucle de tonalité de téléphone, enregistrée par Simon Jeffes sur son répondeur, sur laquelle est posée une mélodie folk guitare/violon, marquant un contraste modernité/tradition.

6/ Mogwai Tracy (Chemikal Underground, 1997) / Throbbing Gristle Death Threats (Industrial Records, 1978)
Groupe écossais, Mogwai est l’un des principaux représentants du courant appelé « post-rock », qui se caractérise par de longues plages le plus souvent instrumentales, conjuguant guitares atmosphériques, explosions soniques et expérimentations électroniques. Tiré de leur premier album Young Team, le magnifique « Tracy » intègre au début et à la fin du morceau des conversations téléphoniques entre certains membres du groupe, un employé du label (1ère conversation) et le manager (2e conversation), qui consistent en des plaisanteries faites à propos de prétendues bagarres au sein du studio d’enregistrement. Au milieu du morceau, est intercalé « Death Treats » du groupe Throbbing Gristle. Comme son nom l’indique, ce court morceau reproduit des messages téléphoniques de menace reçus par le groupe, dont la musique radicale, rencontre entre le bruitisme rock, l’agitprop et l’expérimentation électronique, et les concerts provocateurs faisaient scandale.

7/ Death In Vegas Opium Shuffle (Concrete, 1997)
Où l’on retrouve le message téléphonique de Stéphanie et Violaine (voir morceau n° 2), samplé sur ce morceau tiré du premier album de Death in Vegas, aux sonorités dub et électro-rock. Par la suite, le groupe explorera des paysages sonores plus sombres.

8/ Hexstatic Communication Breakdown (Ninja Tune, 2000)
Hébergé par le célèbre label Ninja Tune, le groupe Hexstatic mêle étroitement musique et vidéo, les deux étant conçus de manière intégrée (chaque morceau est accompagné d’une vidéo). Avec « Communication Breakdown », ils signent un morceau manifestement inspiré du « Telephone Call » de Kraftwerk, avec son style electro et ses multiples collages sonores, évoquant toutes les formes actuelles de communication, du téléphone à Internet, en passant par le fax.

Prochaines activités de RED/Laboratoire Pédagogique

Les chambres d’écoute à Congrès

Le mercredi 16 mars 2011 : # 24 : Abstract Hip Hop/La rhétorique du hip hop, la grammaire de l'electronica (série Versus)

Le mercredi 11 mai 2011 : # 25 : New Weird America/Les USA, un territoire qui fait à nouveau rêver ? (série Territoires imaginaires)

Le mercredi 14 septembre 2011 : # 26 : Du doigté/La harpe et l'accordéon au format pop (série Instruments)

Le mercredi 16 novembre 2011 : # 27 : Green Blue Red/Hommage à Elsworth Kelly (série Arts & Plastiques) avec une mini-conférence

Les cours modestes (lieux à confirmer)
Le cours modeste de musique ou d’art est une brève leçon préparée par un non-spécialiste. Un amateur donne des suites plus académiques (en effet, il prépare une mini-conférence) à un intérêt qu’il a. Un cadre est proposé pour accueillir ses recherches : un public. Un temps d’écoute ou de vision est prévu pour donner corps à ce cours en gestation. Enfin, la participation à un concert ou une exposition (en groupe ou séparément) viennent « achever » la formation. La participation est fixée à 15 € et comprend une coupe de cava (le concert ou l’exposition ne sont pas compris). Lieu des cours : à convenir.
Cours modeste sur Luc Tuymans (en prélude à l’exposition à Bozar du 12 février au 8 mai 2011). La date du cours modeste : le mardi 8 février à 19h. C’est le premier ! D’autres sont prévus…voir sur notre blog : www.redlabopedagogique.blogspot.com

RED/Laboratoire Pédagogique & Congrès présentent

Le transport des voix ou l’absence conjurée


Chambre d’écoute # 23 Pour continuer en français, tapez 1/Le téléphone et ses détournements sonores (série Objets) à Congrès le mercredi 12 janvier 2011 à 19h30

Meilleurs voeux ! Pour cette première chambre d’écoute de l’année nouvelle, nous aborderons le thème du téléphone et de ses détournements sonores. Petit rappel pour ceux qui reçoivent ce type de mail pour la première fois (suite à la création de notre ASBL, nous avons fusionné nos listes de contacts) : une chambre d’écoute est un temps d’écoute collectif autour d’une playlist musicale argumentée.
Depuis son invention, le téléphone n’a eu de cesse de conjurer l’absence. Parler à/avec quelqu’un qui n’est pas là, parler avec quelqu’un qui vous manque, etc. Mais avec l’apparition du téléphone portable, les cartes ont été redistribuées : si avant on téléphonait en espérant pouvoir joindre une personne à la maison, maintenant on est quasiment sûr de joindre la personne où qu’elle soit… D’où la question qui taraude tout le temps les mordus du portable : « T’es où ? »[1]… Alors, cette prothèse technologique, sert-elle notre recherche de l’Autre ou uniquement notre désir de le surveiller ! Grand débat !
Nous, nous allons plus simplement vous proposer une série de morceaux qui parlent de (ou qui détournent) ces curieux objets : le téléphone et la voix humaine (dans cet étrange commerce qui les unit : le transport entre deux lieux)
Voici le programme :
19h30 : ouverture des portes et apéro (aux bons soins de Kremi)
20h30 : chambre d’écoute mixée live par François et moi
21h30 : petit verre pour ceux qui le souhaitent
La participation est fixée à 4 € et comprend la TECC (taxe pour l’écoute collective contextuelle), le booklet imprimé et le CD de la sélection (pour prolonger le plaisir à la maison) pour les quinze premiers inscrits.

Comment s’engager ?

En versant 4 € sur le compte 063-1645113-28 avec votre nom et la mention « I phone ». Le nombre de places est limité à 45 personnes. Merci de vous signaler avant le 10 janvier.

Adresse : Congrès, 40 blvd Pacheco 1000 Bruxelles (en bas des escaliers de la gare)
Mon gsm : 0494/418.465
Facebook : encore et toujours…
Blog : www.grandensemble.blogspot.com
[1] Pour ceux que le sujet intéresse, je recommande chaudement la lecture du livre T’es où ?/Ontologie du téléphone mobile de Maurizio Ferraris, Ed. Albin Michel, 2006.

lundi, décembre 20, 2010

Chambre d'écoute # 10 et 20 : DJ Culture/Hommage au dancefloor...

Toutes les playlists, dans l'ordre de passage...

Set d’Axel

Axel : pourquoi as-tu accepté de participer à ce projet ?
Axel : je suis obligé car c’est moi qui ait organisé ce truc ! Allez, amusons-nous bien !

1/Elastic Reality Cassa de X (Deep Dish Records) 1994
Ce morceau, je l’adore depuis plus de 15 ans. Pour moi, il est parfait pour commencer une soirée. J’ai l’honneur d’être le premier et je crois qu’il faut un morceau particulier pour ouvrir le bal. Pas trop rapide, pas trop lent. Ce groupe est le projet de Brian Transeau, un producteur de musique électronique dont on parlait beaucoup à l’époque. Il est toujours actif mais là, il était au top de sa carrière. Apparemment, ce morceau parle de sexe : la maison du X. C’est bon de penser un peu au sexe sur un dancefloor. Ce disque est publié sur le label de Deep Dish, un duo irano-américain que j’adore… (cfr. Infra)

2/Deep Dish presents Prana The dream (Deep Dish Records) 1994
Un autre projet de Brian Transeau, mais cette fois, il s’agit d’une véritable collaboration avec Sharam et Dubfire (le duo Deep Dish, qui allait quelques années plus tard remixer le monde entier). Comme Cassa de X, j’adore ce morceau pour danser. Il est simple mais les beats sont légèrement métalliques, ce qui donne à ce morceau un côté intemporel… Il parle du monde du rêve…un autre ingrédient important du dancefloor… Laissez-vous faire !

3/Orbital Impact (Internal) 1993
Une longue histoire relie ce morceau et mon humble parcours de niteclubber : j’ai vu ce groupe faire danser 60.000 personnes en tête d’affiche du festival de Glastonburry. J’étais pieds nus. Je buvais de l’eau de source de la région (un sabot à ma voiture à Londres avait grevé mon budget alcool) et je me suis senti transporté dans une autre dimension. Depuis lors, ce morceau fait partie de moi. Il était programmé lors de la première chambre d’écoute sur l’espace… Il le fallait ce soir…

4/Ulf Lohmann Because (Thomas/Mayer remix) (Kompakt)
Un morceau tout simple du grand label de Cologne, déjà proposé lors de la chambre d’écoute consacrée à cette magnifique ville. 120 BPM (battements par minute), c’est plus qu’un repère, c’est une véritable philosophie. J’adore…

5/Matthew Dear You put a smell on me (Ghostly International) 2010
Découvert lundi soir lors de son concert, je n’ai pas résisté : le titre (savant jeu de mots entre smell – odeur- et spell – sort) indique que le DJ est celui qui vous jette un sort, et qui vous fait transpirer… Ce morceau est tout entier tourné vers la magie du dancefloor…

6/An Der Beat Funk (Different Recording) 1999
Ce morceau peut réveiller un mort, depuis plus de 10 ans. Impossible de feindre la lassitude. Vos pieds vous susurrent de vous diriger gentiment vers le dancefloor et de vous exécuter. Résister ne sert à rien ! Découvert en Espagne, testé live au KultuurKafee. Du tout bon !

7/Gabinete Caligari El calor del amor en un bar (EMI-Odeon) 1986
Véritable fer de lance d’une certaine scène new wave espagnole, Gabinete Caligari est actif depuis 1981. Après avoir commencé avec une musique très sombre (limite Joy Division dans la langue de Cervantès), ils revisitent avec brio leurs origines. Ce morceau a toujours été un de mes classiques. Je le passais très tard, quand tout le monde avait abusé de cerveza et de vino tinto.

8/ Los Fabulosos Cadillacs El Matador (Columbia) 1994
Ils viennent d’Argentine. Ils proposent Matador au monde en 1994. Et le monde succombe. Rien à rajouter !

9/Dalaras-Bregovic KI AN ΣE ΘEΛΩ (EMI-Minos) 1997
Une version balkanique du célèbre morceau traditionnel repris (et immortalisé sur les dancefloors) par Rachid Taha. Découvert, en son temps, par mon ami Jérôme Coche avant tout le monde, cette mélodie est un m²ust. Elle permet le rapprochement des corps, et des âmes. Eh oui, le dancefloor est aussi affaire de métaphysique…

10/Stromae House’llelujah (Mosaert/Vertigo) 2010
Ne criez pas trop vite ! Ne me lynchez pas ! Chapeau pour ce petit gars qui a (re)placé la Belgique sur les dancefloors européens. Alors on danse, cette ode aux aspects carthartiques de la danse a crée la surprise cette année. Bonne surprise aussi son concert de mardi soir auquel nous avons assisté en famille (une première) : une reprise de Putain Putain en duo avec Arno et une version de son tube avec un orchestre symphonique virtuel…
Je vous le passe aussi car je trouve le parallèle qu’il fait entre la musique et la religion pertinent. Les boîtes de nuit ne sont-elles pas les nouveaux temples (avec les bourses) ?

Set d’Yves

Axel : pourquoi as-tu accepté de participer à ce projet ?

Yves : Parce que... J'aime bien passer des musiques que j'aime et faire partager mon enthousiasme pour ces musiques.
Si je bouge dessus, j'ai envie que les autre bougent aussi dessus.
Et puis c'est gai de passer des musiques pour des fêtes ... et fêter cet anniversaire ce jeudi 16 décembre 2010 de ta 20° chambre d'écoute "dance"
c'est tof !

Introduction

Dès qu'il y a sélection , il y a défi.. choisir son "top 10" des morceaux "dance" ou 1 heure de DJ, voilà un beau challenge !
En plongeant dans ma discothèque, j'en trouve des dizaines... mais ceux de ce soir sont pour moi le reflet du déclic :
j'entends le morceau, je me lève et je bouge ! Il faut ce moment d'immédiateté pour qu'un morceau me fasse danser. Peu importe le groupe, les paroles.
Dans un instant je vous envoie des morceaux positifs, créateurs de frissons, pour faire la fête ! Des morceaux "Peace & Noise" (Patti Smith)
Passeur de disques pour des soirées de fête essentiellement, je vous propose un échantillon teinté de pop/rock car c'est quand même ce que je préfère !
Allez merci Axel pour cette belle occasion et quel honneur... ! Bon anniversaire à la (10ème) et 20ème Chambre d'écoute !


1/ Faithless - Insomnia - Monster Mix - 1996
Un son puissant, des frissons qui montent, le souvenir d'un concert à Werchter en 2001...toute la plaine dansait !
Leur morceau phare ici en version "monster"... terrible intro !

2/ Chemical Brothers - Hey Boy Hey Girl - extrait compil "singles collection" - 2008
Le morceau pour lancer l'affaire.. l'appel du Dj qui amène les Girls et les Boys sur la piste.
Un groupe que je connais que par quelques morceaux... je vois même pas leurs têtes à ces frères...
Let's go !

3/ Pierre Henry - Psyché Rock - 1966
Le premier morceau rock sur lequel je suis monté sur une scène... un spectacle en gardienne ou primaire, où je faisais la lune...
Quel morceau... Energie pure aux sons expérimentaux des années 60'. Ici la version originale... remixée de nombreuses fois par la suite.
J'ai (re)vu Pierre Henry en 1998 au Bota... un personnage !
Pour rappel : musique composée pour le Ballet du XX° siècle / Maurice Béjart - Messe pour le temps présent... je ne l'ai pas vu ;-(

4/ The Rolling Stones - Sympathy for the devil - 1969 - en live au Madison Square à New York
Fallait un Stones... Un Live car c'est là qu'ils sont les plus forts !
Un morceau de la grande époque... mais pour moi c'est toujours leur grande époque... faut les voir, c'est la fête sur scène, ils s'amusent !
Et puis Charlie Watts, mon batteur fétiche... bon vous l'avez compris , un coup de coeur !
Et puis terrible à jouer à la batterie!

5/ Status Quo - Caroline - 1973
Avec les Stones, ce sont les 2 + vieux groupe de rock encore en "vie" et en action !
Status Quo du début à la fin... mais quel tempo... la fête aussi sur scène ! Un de leur meilleur morceau !
Du BoogiePopRock, simple efficace... Rock'n roll !

6/ Deus - Roses - 1996 - Album "In a bar, Under the sea"
Place au Belge ! Deus a bousculé dans les années 90 le panorama du rock belge...
Pas le + connu du groupe mais pour moi un des meilleurs... Une intro calme mais déjà remplie d'énergie avec cette guitare répétitive, les cordes du violon qui grincent
et la voix de Tom Barman qui monte...
Même en écrivant ce texte, j'ai les frissons qui montent... et ça monte , et ça monte...
C'est vraiment le morceau "anti-dance" mais quelle pêche quand on danse dessus... il me rappelle toujours des fins de soirées au Tat'... là, pas la peine de se demander,
on danse, tourne saute dessus ! Laissez vous aller !

7/ Vive La Fête - Nuit Blanche - 2003 - Album "Nuit Blanche"
Retour aux basses... Dany Mommens quitte Deus et crée avec Els Pinoo ce groupe décallé mêlant fête, françaisenglishnedrelands, sonorité années 80 à la Cure.
Encore une fois un groupe qui sur scène pète la forme. Et puis 2 personnages... et Els !

8/ The Tin Tings - Great DJ - 2008 - Album "We Started Nothing"
Un duo anglais qui amène quelque chose de neuf fin des années 2000 tout en s'inspirant de ... Blondie pourquoi pas.
Un titre de circonstance... et qui n'oublie pas dans les paroles que la musique c'est d'abord affaire d'instruments bien foutus !
Pêche et voix féminine... rien de tel ! Leur premier album... le 2° doit être sorti ?

9/ Rachida Brakni - J'aime regarder les mecs - 2009 - Compil "Madame aime"
Un clin d'oeil à "J'aime regarder les files " de Patrick Coutin... mais version fille ... cette fois-ci ce ne sont pas "les poitrines qui sont gonflées par le désir de vivre"... écoutez...
Un super morceau repris par Rachida Brakni, actrice française; elle est ici sur une compil faite d'actrices reprenant des morceaux pop français... sympa !

10/ Orchestre National de Barbès - Alaoui - dans les années 90... - Album "Live"
Là c'est la découverte du Maroc en 1989 et la passion qui s'en est suivie... pas une musique traditionnelle marocaine mais un "bout d'Afrique égaré au pied du Sacré Coeur" (dixit ONB)
L'orchestre National de Barbès, un collectif qui arrive à faire oublier les frontières et à amener le feeling de son "bled"
Un morceau que je passe chaque fois en soirée et c'est la fête... une de plus ! Fallait un peu de "world" quand même...

11/ Starsailor - Floor to the floor - dans les années 2000...
Un souvenir d'un bal de 14 juillet 2006 en Drôme avec un groupe live - Arcades - qui reprenait ce morceau ! Ambiance...
Et puis le redécouvrir en disque... c'est le genre de morceau qui redonne la pêche... terrrrrible intro encore une fois... je suis pas difficile...
Sinon à part ça... Starsailor???

12/ Underworld - Dirty - 1993 - Compil "UNderwar 1992-2002"
Pour bouger dans tous les sens, ça vient de partout... rien à dire c'est du senti...
Du brut , du tribal et puis tout d'un coup une pause...

13/ Boney M - You gotta home - 1979 - Compil "Boney M The Best Of"
Et non vous n'aurez pas le tube"Barbara Streisand" qui cartonne actuellement et que j'adore... vivement le réveillon!
Je vous mets la "réplique" originale de 1979 par Boney M...et oui...mes enfants étaient paf !
Pour plaire à Axel , une petite réplique philosophique :
"Rien ne se perd, rien ne se crée !", c'est ça...?



Set de François/Space Cookie

Oh, comme il est frustrant de devoir limiter sa sélection à dix morceaux « préférés », là où une centaine de pistes suffirait à peine à rendre compte de la gamme de ses goûts et de ses coups de cœur. L’idée conductrice était de varier les plaisirs sans se limiter à un style, tout en conservant une certaine cohérence. Et d’allier classiques aux dernières nouveautés. On glissera ainsi du jazz à l’électro, en passant par le rock, le post-punk, la soul et d’autres choses encore difficilement classifiables… Bien sûr, j’ai retourné ma liste dans tous les sens, je l’ai modifiée cent fois, pour finalement me décider parce qu’il le fallait bien. Toutes mes excuses donc aux Specials, Go! Team, Sonics, Empire Projecting Penny, Le Tigre, Syrup, Mr. Scruff, ESG, Bees, Althea & Donna, Flying Lizards et bien d’autres, pour les avoir finalement exclus de ma liste pour des raisons purement arbitraires…


1. Buddy Rich The Beat Goes On (Blue Note, 1967)

On commence avec le swing ondulant de ce morceau du batteur jazz Buddy Rich, reprise d’un morceau de Sonny & Cher. Ca débute en douceur avec la charmante voix de Cathy, la propre fille de Buddy Rich, et ça se termine par un déferlement de batterie et de cuivres pétaradants.

2. Pilooski AAA (I Get RVNG, 2010)

Instigateur de la série « Dark & Lovely » exhumant sur vinyle tout ce que la musique connaît de bizarreries mélancoliques, Pilooski est devenu un remixeur et un ré-éditeur incontournable, aux goûts très éclectiques (Frankie Valli, CAN, The The, LCD Soundsystem, Dee Edwards,…). AAA nous emmène dans une Jamaïque étrange, bercés par une voix féminine envoutante et emportés par un rythme hypnotique.

3. Yse Saint Laur’ant Abah Dabah Dis (Popular People’s Front Edit) (White Label, 2010)

J’aime les morceaux qui nous font perdre nos repères et nous emmène dans des contrées inexplorées. Ce morceau est totalement mystérieux : il s’agit manifestement d’un edit electro d’un vieux morceau, mais impossible d’en trouver l’origine : ni de cette intrigante « Yse Saint Laur’ant », ni de la langue chantée. Quant au Popular People’s Front, il s’agit d’un collectif qui publie ses edits dans sa collection « Limited Series », dont est issue ce morceau.

4. Talking Heads Slippery People (Cosmic Boogie Edit) (EMI, 1984)

Il s’agit d’un morceau que je passais fréquemment dans mes jeunes années de DJ, dans sa version « live », tirée de l’album (et du film) Stop Making Sense. Talking Heads est resté aujourd’hui un groupe particulièrement précurseur et influent. « Slippery People » célèbre les noces du funk blanc et de la musique africaine. Il est délivré dans son récent « cosmic boogie edit », qui en allonge le plaisir.

5. Chicken Lips Ron Silver (Big 200 Version) (Lipservice, 2010)

Actif depuis une dizaine d’années, le groupe anglais Chicken Lips est surtout célèbre pour son hit electro « He Not In ». « Ron Silver » est un disco funk endiablé, directement inspiré de la scène punk-funk et disco-not-disco du début des années 80.

6. Liquid Liquid Optimo (Optimo Mix) (99 Records, 1983, Domino, 2008 pour le remix)

Liquid Liquid est de ces groupes dont l’influence est inversement proportionnelle au nombre de disques qu’ils ont publié, en l’occurrence une poignée d’EP’s sortis à l’aube des années 80 mais aucun album. Leur musique est essentiellement faite de rythmique et de basse, faisant s’entrechoquer le funk, l’afrique, le brésil et le no-wave new-yorkais. Leur plus célèbre morceau, « Cavern », a été pillé par Grand Master Flash pour son « White Lines (Don’t Do It) » et le procès qui s’en est suivi a débouché sur la faillite des deux labels concernés… Lors de la réédition de leur œuvre en 2008, le label Domino a demandé au duo écossais Optimo de remixer le titre qui à l’évidence avait inspiré leur nom. Le résultat est très convaincant.

7. Munk feat. James Murphy & Nancy Wang Kick Out the Chairs (WhoMadeWho Remix) (Gomma, 2004)

Il était difficile de faire ma sélection sans y inclure d’une manière ou d’une autre James Murphy, qui avec son groupe LCD Soundsystem et son label DFA (Rapture, Hercules and Love Affair, Juan Mac Lean,…), aura le mieux incarné ces dernières années le mariage entre rock et danse, passé et présent. Il est invité ici à prêter sa voix sur un morceau du groupe allemand Munk, remixé par le collectif danois WhoMadeWho, qui transforme tout ce qu’il touche en petite bombe groovy.


8. Tom Tom Club Wordy Rappinhood (12’’ Version) (Island, 1981)

Formé de deux membres des Talking Heads, Tom Tom Club a délivré en 1981 deux pépites remuantes avec « Genius of Love » et ce « Wordy Rappinghood », qui sont restés des classiques indémodables.

9. Pitchtuner Shocco (Doxa Records, 2003)

Pitchtuner est un groupe germano-japonais, basé à Berlin et Osaka. Chanté en japonais, Shocco est un merveilleux condensé d’énergie punk, de funk hybride et d’électro barrée.

10. Shirley Ellis The Clapping Song (London Records, 1965)

La boucle est bouclée, on est parti des années 60 pour y revenir au final, avec ce qui est un de mes grands classiques de DJ, le formidable « Clapping Song » de Shirley Ellis, ou comment danser le sourire aux lèvres, en se replongeant dans l’enfance.

Set de Jacques

Axel : Pourquoi as-tu accepté de participer à ce projet ?
Jacques :Spécialiste en rien et amateur de presque tout en matière de musique, je suis encore moins doté d'une véritable culture de club. N'étant de plus pas d'un naturel très appliqué, mes sets empruntent plutôt des voies buissonnières qui, à force de tours et détours, m'imposent de grands écarts stylistiques. Ce Salon Musical un peu particulier m'offre précisément l'occasion de proposer une heure de musique diversifiée, voire débraillée, mais doté toutefois d'un mince fil rouge. A vous de le découvrir !

1) Yellow Magic Orchestra – Absolute Ego Dance (Alpha)
Impossible de débuter ma séquence sans rendre hommage à ce trio capital dans l'évolution de la pop japonaise jusqu'alors encore très marquée par les canons occidentaux. Pionniers de l'électronique dans leur pays, le groupe aura joué avec les signes, associant amour du modernisme clinquant et goût pour les saveurs mensongères de l'exotisme, passant du rigorisme à l'exubérance. Ce titre, issu de leur deuxième album 'Solid State Survivor' sorti en 1978, mèle un thème electro-pop à une danse traditionnelle d'Okinawa, façon élégante et humoristique de nouer le circuit intégré au kimono.

2) Abel Zénon – Pas O Soué La (Sound Way)
En vogue dans les bals antillais à la fin des années soixante, le tumbélé aura, de façon éphémère tenté la fusion entre les musiques populaires de Guadeloupe et Martinique (biguine et gwa-ka) et des influences extérieures (rumba congolaise, le compas haïtien et les rythmes cubain). On doit ce titre particulièrement enlevé au saxophoniste Abel Zénon, roi des punchs en musique à cette époque.
Vas-y Zénon, c'est bon !

3) Juicy Fruits- Jenny Wa Gokigen Naname (Columbia)
La carrière de ce groupe japonais fut éphémère et discrète, une poignée d'albums à la signature très typée: des thèmes surfs, new wave et techno-pop acidulés par la voix candide et enfantine de Okuno Astuko. Mais de cet amalgame naquit ce (traduction libre) 'Jenny est de Mauvaise Humeur', peut-être l'un des titres les plus populaires et repris de l'histoire de la pop japonaise et qu'une Lio aurait pu, chez nous, reprendre à son compte.


4) Andreas Dorau und die Marinas – Fred Von Jupiter (Ata Tak)
Elles se pâment pour son charme et sa flatteuse musculature, les Marinas. Le jupitérien Fred, dont nos juvéniles choristes (elles avaient 13 ans, au moment de l'enregistrement de la chanson) chantaient en 1981 les louanges, n'était autre qu'Andréas Dorau, à l'époque à peine plus âgé qu'elles (17 ans) mais déjà auteur d'un savoureux album de pop miniature servies par des synthés bons marchés et dont la formule (humour dada + esprit punk) se retrouvera appliquée chez d'autres artistes estampillés Neue Deutsche Welle (la new wave allemande), tels que Trio et son fameux 'Da Da Da',

5) Xeno and Oaklander – Sentinelle (Wierd Records)
Ici, c'est un peu de la Belgique qui s'exporte vers les Etats-Unis. Car cette mélodie glaciale et flegmatique, tapissée d'arpégiateurs et de boîtes à rythme, marqueurs sonores typiques de la cold wave pratiquée il y a 25 ans dans nos régions ainsi qu'en France (Trisomie 21, Siglo XX, Polyphonique Size) est en réalité de facture récente, new-yorkaise de surcroît et parade aujourd'hui sous le vocable de minimal wave.


6) Rocca - Baby Mine (Myspace)n
Découvert il y a 3 ans aux hasards mes de pérégrinations à travers les pages du site communautaire MySpace, ce titre aux synthés épais et à la rythmique opératique conçu par le jeune duo suédois Rocca est devenu l'un des invités les plus réguliers de mes platines. 'Baby Mine' constitue un parfait exemple de cette obsession rétrospective pour le clinquant des années 80 (Moroder, Trevor Horn) qui traverse une bonne partie de la production musicale pop contemporaine.

7) Magnus International – Kosmetik (Full Pupp)
Tiré d'une compilation éditée par Full Pupp, le label de l'artiste norvégien Prins Thomas, ce morceau exploite un filon dance, certes bien rôdé (un beat space disco, un thème electro et quelques nappes de synthés pour faire monter l'émotion) mais pratiqué avec une indéniable élégance et qui respecte parfaitement le cahier des charges de tout floorfiller qui se respecte

8) Lizzi Mercier Descloux – Fire (ZE Records)
Plus connue à travers son hit de 1983 d'inspiration sud-africaine 'Où Sont Passées Les Gazelles', cette chanteuse aura été l'une des égéries du très stylé ZE Records, un label franco-américain tenu par son compagnon Michel Esteban et qui s'inscrit carrefour du punk, de la no-wave new-yorkaise et de la disco, forme musicale hybride que résume l'oxymore disco not disco. Ici, elle insuffle une irrésistible pulsation à 'Fire', vieux succès d'Arthur Brown, chanteur anglais excentrique tombé dont la petite histoire retiendra son goût pour les mises en scènes grand-guignolesques. .

9) Harlem World Crew Rapper – Rappers Convention (Hero)
A la fin des années septante, avant que le DJ et ses platines n'écrase le genre de tout son poids et de ses scratchs, le hip hop pouvait encore s'exprimer avec accompagnement live, des musiciens assurant le support musical, le plus souvent funk ou disco, à charge des MC's d'innerver le morceau par l'inventivité et le dynamisme de leur le flow.
Cet irrésistible enregistrement de 1980 voit se succéder derrière le micro quatre rappers qui furent actif en tant que membres résidents du club new-yorkais Harlem World.

10) Grimes – Devon (Arbutus)
Et, pour finir, dansons ou lévitons en compagnie de la Montréalaise Claire Boucher, dont la ritournelle éthérée aurait jadis fait bonne figure sur 4AD, le label des Cocteau Twins. Armée de son laptop, cette musicienne et illustratrice (c'est d'époque) à peine sortie de l'adolescence a déjà livré en 2010 deux albums à la production hésitante, de petits essais inachevés, fragments oniriques aux réminiscences nombreuses jetés sur disque et qui constituent une nébuleuse sonore très personnelle.



Set de Maya

Axel : Pourquoi as-tu accepté de participer à ce projet de chambre d’écoute ?

Maya : ...parce que le projet le valait bien, le lieu aussi et sans doute aussi l'idée d'écoute attentive de la musique... partage, découverte...


Set de Maya

1/
Intro. voix d'homme. Mode d'emploi du set...

2/
Film 2 / GRAUZONE / Die Sunrise tapes / 1985
Grauzone est un groupe suisse fondé au début des années 1980 par Stéphane Eicher et son frère Martin Eicher.

3/
How much are They / YAH WOOBLE & Holgar Czukay & Jaki Liebezeit / 1981
Groupe anglais dont Yah Wooble est le chef de file, éjecté de PIL (Public Image Limited) groupe créé à la suite de la fin du groupe des Sex pistols.

4/
Eisbar / GRAUZONE / Die Sunrise tapes / 1985
Groupe qui fait partie d'un genre musical apparu à la fin des années 1970 et qui a connu ses heures de gloire essentiellement dans la première partie des années 1980. On peut le considérer comme un sous-genre du courant post-punk, dont il radicalise le minimalisme et la froideur.

5/
Lady Shave / Fad Gadget / Album? / 1982
Fad Gadget est le nom de scène de John Francis (Frank) Tovey (8 Septembre 1956 au 3 avril 2002), un influent avant-garde britannique musicien électronique et de la chanteuse. Il était un partisan de la New Wave à la fois et au début de la musique industrielle.Comme Fad Gadget, sa musique a été caractérisée par un usage distinctif de synthétiseurs en liaison avec les sons d'objets trouvés, y compris les exercices et les rasoirs électriques. Ses paroles sombres, sarcastique, et d'humour noir, souvent en couches de sens et de discuter de sujets tels que les machines, le bâtiment, la sexualité humaine, et la violence physique, étaient chantés dans un bourdonnement, souvent la voix sans expression.

6/
No Shuffle / Front 242 / / 1984
Musique électronique radicale et minimaliste, à la fois dansante et aux rythmes martiaux, soutenue par des samples issus de la télévision, ainsi que par une imagerie paramilitaire. Cet ensemble sans concession les place dans la mouvanceindustrielle initiée par des groupes anglais tels que Throbbing Gristle ou Cabaret Voltaire ou des groupes de musique électronique allemands (Kraftwerk...)

7/
Marian / SISTERS OF MERCY / First and Last and Always / 1985
Groupe de rock gothique anglais. Le nom du groupe serait inspiré d'une chanson de Leonard Cohen où la locution « the sisters of mercy » désignerait alternativement un ordre religieux du même nom et des prostituées. Très influent dans les milieux gothiques, le groupe n'a pourtant sorti que trois albums en près de 25 ans d'existence.

8/
Lena / 2 BELGEN / Lena / 1985
(2 Belgen) Groupe belge (cocorico) de New-wave des années 80. Le groupe est né à Gand à l'initiative du chanteur / guitariste Rembert Le Smet et du batteur Herman Celis.

9/
Psyche Rock / Pierre Henry & Michel Colombier / Psyché Rock / 1997
Pierre Henry, compositeur français. Il est considéré comme le « père » (avec Pierre Schaeffer) de la musique électroacoustique (comprenant la musique concrète, la musique acousmatique, et la musique électronique).

10/
Plastic dream / JAY DE / Plastic dream / 1992
Un classique dans la mouvance House européenne. Succès mondial.

11/
Ibiza / AMNESIA / Rock to the Beat / Amesia / 1988
l’Amnesia est une boite de nuit très électro à Ibiza… Véritable tube de l'année
et dans le top 5 de mes tracks préférés

12/
20Hz / CAPRICORN / 20hz / 1993
Si les Gilles de Binche pouvaient sortir de leur cercle, ils se seraient déplacés ce soir pour accompagner ces rythmes de batteries.

13/
Housewife / DAAN / Victory / 2004
Morceau tiré du troisième album du groupe, Daan Stuyven et ses musiciens proposent ici une version instrumentale rythmée et efficace,
ce morceau sert aussi d'introduction lors des concerts de la tournée.

14/
Raven / PROXY / The Bang Gang Dejays / 2008
Roulez jeunesse... woooiiiiiiiinw! wooooooinnninw!

15/
Vomit In Style / THE SUBS / Vomit In Style / 2010
Morceau au titre inspiré d'une mésaventure arrivée à un des membres du groupe durant un concert pendant qu'il jouait il a ... in style!
Originaires de Gand, style électro-house,les voir en concert est une expérience unique.

16/
Interlude musical pour annoncer la fin du set

La danse est de la philosophie en acte[1]

Chambre(s) d’écoute #10 et 20 :DJ Culture/Hommage au dancefloor à Congrès le jeudi 16 décembre de 19h à minuit

Longtemps annoncée, toujours reportée, elle voit enfin le jour : une chambre d’écoute différente, qui célèbre ce qu’elle entendait critiquer : le dancefloor comme unique lieu d’écoute collective (le concert est encore autre chose).
Pour cette soirée, j’ai réuni cinq DJ’s (amateurs, professionnels ? Peu importe) et je leur ai demandé de choisir les 10 morceaux qu’ils préféraient pour danser. Libre à eux d’interpréter cette consigne comme ils l’entendent.
Le choix des morceaux sera argumenté sur un écran géant (pas de livret, donc). Le set de chaque DJ ne dépassera pas 1 heure. Maya Cox, Jacques de Neuville, Yves Cardoen, François Dubuisson ont accepté de relever ce défi (je serai le cinquième). Je les remercie très fort.
Comme une petite soirée, cet événement rassemblera les travailleurs de tous bords pour une sorte d’Afterwork Party, apéro underground, happening dédié à la DJ Culture, etc 5 heures de musiques ininterrompues, dansantes et argumentées…
Remarque : cette chambre d’écoute n’est évidemment pas réservée aux plus jeunes sous prétexte qu’elle rend hommage à la DJ Culture (l’âge cumulé des DJ’s de ce soir totalise deux siècles !) Soyez curieux : merci de passer nous dire bonjour !


Programme :
19h : ouverture des portes et du bar. DJ set d’Axel.
20h – 24h : Yves, François, Jacques, et Maya.
24h : clôture

La participation est fixée à 3 € et comprend la TECC (Taxe pour l’écoute contextuelle et collective) et un petit budget pour remercier dignement nos DJ’s bénévoles.

Comment s’engager ?

Pas de réservation (car pas de livret à produire). Votre présence enthousiaste suffit. Nous espérons être une centaine donc n’hésitez pas à en parler autour de vous et à amener vos amis.

Adresse : Congrès, 40 blvd Pacheco 1000 Bruxelles (attention il faut rentrer dans la gare par les escaliers)
Mon gsm : 0494/418.465
Blog : www.grandensemble.blogspot.com


[1] J’emprunte cette citation à Paul Valéry, cité par Alain Foix dans son Je Danse donc je suis, collection Chouette Penser, Giboulées, Gallimard jeunesse. Une très bonne collection d’ouvrage de philo pour les jeunes dirigée par Myriam Revault d’Allonnes.

Chambre d'écoute # 22

Nous sommes une myriade de choses que nous ignorons[1]

Chambre d’écoute #22 : Maîtres et disciples/l’école et ses enjeux au regard de la musique (série Para//èle)

Introduction :
Deuxième partie de la soirée, cette chambre d’écoute entend mettre en musique certains des thèmes qui nous motivent en tant qui fondateurs de l’asbl RED/Laboratoire Pédagogique. Si vous n’étiez pas là au cocktail, procurez-vous vite un papier explicatif. Nous avons besoin de vous, de vos contacts, de vos idées et de votre enthousiasme.
Ce soir, François et moi-même allons vous proposer un parcours musical qui entend d’abord solliciter votre mémoire d’écolier (c’est la classe de Maître François) et ensuite remettre en question ce vécu et le confronter aux défis actuels (c’est la classe de Monsieur Axel).
Merci à Congrès de nous accueillir une fois de plus, merci à François de me prêter main forte. Merci à vous d’être là. Créer une asbl, cela prend du temps : vos CD ont pris un peu de retard. Je vous prie de m’excuser.

Maîtres et élèves : Tracklist

Classe de Maître François
1/ Intro Disque 33t longue durée
En guise d’introduction, une petite madeleine de Proust évoquant ces disques dont les histoires ont égayé nos jeunes années d’école…



2/ Four Tet Parks (Domino)
Kirian Hebden, alias Four Tet, est considéré comme l’un des pionniers du “folktronica” mélange d’instruments acoustiques et d’expérimentation électronique. « Parks » évoque les sorties d’école avec les enfants se précipitant dans les parcs ensoleillés pour se courir après…

3/ Catherine Demongeot Zazie dans le métro (Naïve)
Il s’agit d’un court dialogue tiré du film réalisé par Louis Malle d’après l’œuvre de Raymond Queneau, dans lequel Zazie nous explique les raisons de sa vocation d’institutrice. Savoureux.

4/ Takagi Masakatsu Com March (Karaoke Kalk)
Musicien et vidéaste japonais, Takagi Masakatsu réalise des miniatures musicales poétiques faites de sons délicats, de bruitages et d’éclats de voix. « Come March » nous emmène dans une classe maternelle japonaise, avec ses instruments jouets, ses babillages enfantins et son atmosphère ludique.

5/ Machinefabriek Dansen Met Groene Groenten (Type)
Machinefabriek est le projet du musicien néerlandais Rutger Zuyderveldt, à la production florissante (il sort un nouvel enregistrement tous les mois). Extrait du 45 t « Lendelietjes », ce morceau détourne une cassette de leçon de néerlandais et ses phrases absurdes en charmante ritournelle électronique.

6/ Boards Of Canada Aquarius (Warp)
Groupe composé d’un duo écossais, Boards of Canada conçoit une musique électronique abstraite (peu de chants) et atmosphérique, fortement liée au monde de l’enfance, aux préoccupations écologiques et aux théories mathématiques. Issu de premier album Music Has the Right to Children, Aquarius évoque les leçons de couleurs (« orange ») et de nombres (des suites de chiffres égrenées de manière machinale) sous les rires amusés de bambins.

7/ Laurent Garnier Jeux d'enfants (F Communications)
Pape de l’électronique française, DJ résident de la légendaire Hacienda de Manchester, Laurent Garnier s’est récemment tourné vers des productions plus introspectives, éloignées des impératifs du dancefloor. Le bien nommé « jeux d’enfants » déploie sur une rythmique martiale des sons d’ambiance tirés d’une cour de récréation, pour finir sur une célèbre comptine, à reprendre en chœur…

8/ Rappers Delight Club Hum (2008)
On termine cette sélection avec le résultat réjouissant d’un projet musical réalisé à la Glenallan Elementary School à Silver Spring, où l’on apprend à des enfants de 5 à 12 ans à s’exprimer par le rap et travailler les rythmes, juste après les cours. Les morceaux enregistrés ont été postés sur leur site myspace et ont rapidement rencontré un large succès. Le groupe britannique Go Team ! (très recommandé) les a invités sur leur second album paru en 2008, sur le morceau « Universal Speech ». « I’m rappin’ Let’s goooooo ! »

Classe de Maître Axel
1/Britten The Young Person’s Guide to the Orchestra (Teldec Classic) interprété par le BBC Symphony Orchestra sous la direction de Sir Andrew Davis
Ici aux Chambres d’écoute, on aime bien Britten. Il est déjà apparu dans l’une ou l’autre sélection. Aujourd’hui, c’est une toute autre histoire. Ce morceau est le morceau pédagogique par excellence. Il a été crée pour accompagner un film qui présente les différents instruments de musique composant l’orchestre. Pour ce but pédagogique noble, Britten reprend un thème et une fugue de Purcell issus d’Abdelazar, ou la revanche du Maure. Les 13 variations représentent chaque fois un instrument (ou groupe d’instruments). Dans la fugue, les instruments font leurs entrées dans le même ordre que dans les variations. Nous n’aurons pas, malheureusement, la fin (sauf ceux qui ont le CD). Cette pièce illustre à merveille le ton démocratique que Britten donne à son travail : l’individuel prime sur le collectif, chaque joueur est comme un soliste… On aimerait voir appliquer ces principes dans nos classes.

2/Miwon Vertizontal (City-Centre-Offices)
Pour les membres fondateurs de RED/Laboratoire Pédagogique (sorry j’aime cette expression un peu pompeuse), ce morceau a valeur de manifeste. En effet, un de nos principaux axiomes de travail est basé sur la notion de « transversalité ». Dans la classe, le professeur est sommé de choisir entre la relation verticale (« l’autorité du maître prime ») et la relation horizontale (« le professeur comme copain »). Ces deux impératifs mènent à une impasse. La relation transversale (vertizontale selon Miwon) est une position qui renvoie dos-à-dos ces deux approches. Le travail sur les rôles dans un cadre précisément balisé permet une véritable écoute et prise en considération de l’élève. L’élève est une intelligence en devenir face à l’intelligence elle-même en devenir du professeur. Ce dernier est là pour assurer le cadre et les apprentissages. La pure verticalité a des relents de fondamentalisme, la pure horizontalité d’anarchisme. Ce concept de transversalité dans son usage institutionnel est un emprunt au grand Félix Guattari (RIP).

3/Beatkitten Bored ? (Swim)
Ce groupe est un mystère sur le mystérieux label de Colin Newman (membre du très influent groupe des années 80 Wire, accessoirement producteur de Minimal Compact et mari de Malka Spiegel, membre du même Minimal Compact). Il ne parle pas d’école mais en posant la question de l’ennui, je me sens justifié à vous le proposer ce soir. La jeune femme qui parle semble regarder par la fenêtre (pourrait-ce être la fenêtre d’un local scolaire ?) et décrit le monde tel qu’elle le voit. Une façon comme une autre de tuer le temps. Les élèves s’ennuient ? Pas si sûr ! Les élèves ressentent mal l’école quand elle est mortifère, en ferrant leurs désirs et leurs corps. L’école peut s’envisager d’une autre façon : comme un espace d’intervention pour ses usagers. Des actions ponctuelles intra et extra muros rendent l’école attachante. Quand les usagers (profs, élèves, éducateurs, personnel d’entretien, …) sont invités à participer, à intervenir, des liens se créent, des passerelles se font, du sens circule. On s’ennuie moins quand on est acteur de sa propre formation. Wim Delvoye dit : « mieux vaut être le virus que de tomber malade ». Alain Badiou : « ce n’est pas parce qu’on vitupère contre une institution qu’on a cessé de l’aimer ». Il y a un véritable travail à faire pour rendre l’école plus excitante et s’émanciper du joug institutionnel.

4/Victor Bermon Stacked notebooks (Hefty Records)
Au terme de ses études, le risque pour un élève est de voir son travail comme une pile de cahiers qu’il a mis douze ans à remplir patiemment pour pouvoir les brûler aujourd’hui. La solution est de travailler non pas à remplir des cahiers mais à collecter des traces. Le philosophe Michel Foucault (une de nos grandes références) a un mot pour ça qu’il emprunte à Sénèque : les hypomnemata ou supports de la mémoire. Des traces collectées patiemment, pour leur valeur sentimentale et heuristique[2]. Rassemblées dans un carnet, elles permettent de faire sens après-coup. Un travail de réécriture, de recollection. Des fragments de sens, loin des cahiers que la célèbre comptine nous invite à brûler.

5/Radiant Idiot Revenge of the Phoney Youth (Vertical Form)
J’adore le nom de ce groupe et de ce morceau. Tous deux s’appliquent si bien à notre propos de ce soir. L’idiot radieux, est-ce l’élève ou le prof ? Et cette revanche de la jeunesse fausse, simulée, poseuse, factice (autant de traductions que j’emprunte à mon Robert & Collins), comment l’interpréter ? On dit beaucoup de mal de nos jeunes dans la presse et dans une certaine littérature réactionnaire. Prenons le mot « Factice ». Qui est factice ? Qui accuse ? La facticité menace chacun d’entre nous à chaque étape de la vie. L’idiot radieux, c’est aussi une autre façon de dire que le bonheur n’est pas toujours là où on le croit. Le jeune qu’on accuse à tort, il se venge, ça s’est sûr !

6/Hanne Hukkelberg Seventeen (Nettwerk)
On parlait de jeunesse factice et, sous des airs de gentille chanson pop, ce morceau aborde un sujet très sérieux : une certaine jeunesse dorée qui, à défaut de briller sur les bancs de l’école, choisit la voie de la reconnaissance facile. Le jeune devient alors l’objet d’un maître. Il devient le « king of cash », « fed on champagne ». Pour Hanne Hukkelberg, il est juste une marionnette qui s’ignore. Hanne Hukkelberg vient de Norvège et son groupe use d’instruments proches des Readymades de Marcel Duchamp : une roue de vélo, un four et un frigo.

8/Mi And l’Au Study (Young God Records)
Un autre groupe que nous avons déjà entendu aux chambres d’écoute. Rappelez-vous : ce disque a été enregistré dans un petit chalet enneigé de Finlande, avant d’être mixé à New-York pour finalement être accueillies sur le label du grand Michael Gira. Study nous invite à surfer sur la vague de la connaissance. Ne pas oublier ce qui a été fait, pressentir ce qui arrive, sortir de sa cachette : un hymne à l’école. Au final, Mi And L’Au nous enjoigne de « Réveiller demain ! ».
Le nom du label -Young God- (jeune dieu) est aussi une invitation à chérir notre jeunesse.

9/Klaus & Kinski Mama, no quiero ir al colegio (Jabalina Musica)
Au pays de la musique pop espagnole, Juan Sanchez est mon maître. Il est l’homme qui fait danser la Plaza d’Altea depuis 20 ans et je voudrais lui rendre un hommage. C’est lui qui m’a conseillé ce CD cet été. Originaire de Murcia, Klaus & Kinski est un duo qui fait penser à Jeanette (rappellez-vous Porque te vas, la musique du film Cria cuervos) et à Cathy Claret (Loli-lolita dans les années 80). Cette ballade pop nous fait partager les affres de celui qui doit aller à l’école. Une jeune fille ne veut pas grandir, pas travailler, pas mourir (quel raccourci sémantique étonnant !) Marina lui prête sa voix suave. Et moi, j’ai envie de la contredire : rester à la maison et dormir, c’est un peu mourir aussi.


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Prochaine chambre d’écoute à Congrès : le jeudi 16 décembre 2010 de 19 h à minuit : 10 x 20 en 2010/Dj Culture : un hommage des chambres d’écoute au dancefloor

Finalement, la dixième chambre d’écoute rencontre la vingtième (10x20 en 2010). C’est la chambre d’écoute spéciale Dancefloor. 5 DJ’s passent les 10 morceaux qu’ils préfèrent pour danser. Les notices seront projetées. Vous pourrez danser en lisant (ou vice versa). 5 heures de musique en continu pour une afterwork party façon chambre d’écoute. François Dubuisson, Jacques de Neuville, Maya et un invité surprise (plus moi) ont déjà répondu présent. Plus d’infos très prochainement…

Dorénavant, les chambres d’écoute seront une émanation enthousiaste de RED/Laboratoire Pédagogique… Merci merci
[1] J’emprunte cette belle expression à D.H. Lawrence dans son traité sur l’éducation « Eduquer le peuple » in De la rébellion à la réaction, Ed. Anatolia, 2004, p. 57
[2] Pas de panique, j’ai vérifié pour vous la définition de ce mot au dictionnaire. Vous n’aurez pas à demander à votre voisin ou à faire semblant : heuristique : qui sert à la découverte.

Nous sommes une myriade de choses que nous ignorons[1]

Chambre d’écoute # 22 Maîtres et disciples/L’école et ses enjeux au regard de la musique (série Para//èle) le mercredi 17 novembre à Congrès

Fondamentalement, l’école a pour tâche de révéler l’enfant à lui-même. Lors de la dernière chambre d’écoute, j’avais annoncé la prochaine création d’une ASBL liée à la problématique scolaire. RED asbl naîtra ce soir-là et c’est autour de cette heureuse naissance que s’articulera la prochaine chambre d’écoute. Vous êtes invités à ce double événement.
L’école est sans doute la chose la plus importante de la société car elle prépare tout le reste. Elle forme des hommes et des femmes, des citoyens, des artistes, des entrepreneurs, etc. Couper les branches de l’école, c’est condamner l’arbre à rester au fond d’une courette, à l’ombre, chétif et étouffé.
Maintenant, dire que l’école fonctionne partout de façon harmonieuse, ce serait se voiler la face. L’école est le creuset des inégalités qu’elle s’applique à maintenir. L’école casse, parfois, de l’enthousiasme comme un véritable rouleau compresseur.
Cette nouvelle chambre d’écoute entend poser certaines questions en prenant appui sur des musiques actuelles.
Que veulent les jeunes ? A quoi sert l’école ? Avec quel type de bagage sort-on ? Voici une série (non-exhaustive) de questions que nous aborderons ce soir-là.
Le programme de la soirée :
19 h : Cocktail de lancement de RED asbl ; en présence des fondateurs
20 h : Possibilité de grignoter et de boire un verre à la buvette de Congrès
21 h : Chambre d’écoute mixée live par Axel et François
22 h : Possibilité de boire un (dernier) verre

Comment s’engager ?

En versant 3 € sur le compte 063-1645113-28 avec votre nom et la mention Hey teacher !. Le nombre de places est limité à 40 personnes. Merci de vous signaler avant le 10 novembre 2010.

Adresse : Congrès, 40 blvd Pacheco 1000 Bruxelles
Mon gsm : 0494/418.465
Facebook : encore et toujours…
Blog : www.grandensemble.blogspot.com




[1] J’emprunte cette belle expression à D.H. Lawrence dans son traité sur l’éducation « Eduquer le peuple » in De la rébellion à la réaction, Ed. Anatolia, 2004, p. 57

Chambre d'écoute # 21

« … on prend un peu de sable dans le creux de la main et l’on se perd aussitôt sans espoir dans une masse inconcevable …[1] »

La Structure des révolutions musicales : musiques et sciences (Série Para//èles)

Bonsoir et bienvenue à cette 21 ème chambre d’écoute.
En ces temps d’incertitude (politique, économique, …), le commun des mortels aime avoir un socle sur lequel se reposer. Un socle de certitudes. Une façon de voir le monde qui rassure. Pour certains, c’est la religion qui constitue cet horizon de sens (sujet de notre précédente Chambre d’écoute), pour d’autres, ceux qu’on appelle les esprits « cartésiens », c’est la science qui remplit ce rôle.
La science découvre, confirme, rend possible : la litanie des verbes qui rassurent est longue.
En face, il y a ceux que la science effraie. Le philosophe Martin Heidegger parlait lui (avant de sombrer dans son délire pronazi) d’arraisonnement du monde. Mettre le monde à notre service, quitte à lui faire perdre sa poésie, sa magie.
Nous allons ce soir explorer ces deux facettes de la science. Comme lors d’une chambre d’écoute précédente consacrée au Corps Révélé (lors d’une soirée-vernissage pour découvrir la peinture d’Etienne Lengrand au Bunker), je vais vous proposer un parcours. Nous allons passer du Big-Bang à l’apparition de la vie, des mammifères aux infections, des dérives aux retours à la lenteur… Toutes ces théories sont des « paradigmes » : elles sont vraies jusqu’ au moment où elles laissent la place à d’autres…
Bon voyage et rendez-vous dans 45 minutes ! Merci pour votre écoute enthousiaste…



Tracklist

1/Intro : The KLF Madrugada Eterna (KLF Communications) A l’aube des années 90, Jimmy Cauty et Bill Drummond installent leur bande-son ambient dans les esprits curieux. KLF est l’acronyme de Kopyright League Front et nos deux comparses militent pour le libre usage des sons. Nous sommes encore aux balbutiements de la musique Dance et, l’année d’après, nos deux comparses squatteront la planète avec leur album The White Room. Cet extrait nous place dans le miracle de l’éternité (si ma traduction est correcte) et provient de l’album Chill Out. Pas mal pour un début…

2/Fisk Industries We Saw Orion (Highpoint Lowlife) Les planètes du système solaire nous placent d’emblée devant la question enivrante de l’origine du monde. La thèorie du Big-Bang est, je crois, le paradigme à ce sujet. J’ai lu récemment des petites choses fascinantes sur le sujet que je ne me risquerai pas à vous résumer à part une : si vous prenez un vaisseau spatial et que vous volez toujours tout droit à l’infini et bien … après un certain temps (le très long temps de la science) vous reviendrez au point de départ… Je ne sais pas si cela me rassure… Cela ressemble à la formation d’un gouvernement. Fisk Industries est le véhicule musical de Mat Ranson, un « visual artist » basé à Londres.

3/Future Sound Of London Lifeforms (Path 1) (ebV/Virgin) Actif depuis les années 90, ce groupe de musique ambient est formé de Garry Cobain et Brian Dougans. Ils sont toujours actifs, surtout sur le web. Un petit détour par leur site vous fait entrer dans leur monde : graphic design, musique, communautés, etc. L’acronyme de leur label ebV signifie Energy Brain & Violence. En squattant directement ce monde virtuel (ils ont été parmi les premiers à donner un concert depuis leur studio mais retransmis dans le monde virtuel grâce à la technologie ISDN alors émergente), ils lui ont donné ses lettres de noblesse. Le morceau Lifeforms est issu du double album du même nom. Sur le maxi, on trouve 7 chemins (path) différents. La métaphore biologique (et son parallèle avec la toile) est une grande source d’inspiration. On retrouve ici la voix d’Elisabeth Frazer (de Cocteau Twins, groupe très influent dans les années 80).

4/Icarus Mutations (Leaf) Ces formes de vie émergentes vont muter. La cellule va se complexifier. Dans un verre d’eau, des embryons de vie, dans des grains de sable, des mondes… La musique de Sam Britton et Ollie brown nous parle de ce fourmillement dérangeant. Ils mêlent la musique contemporaine à la manipulation sonore, sans oublier une certaine dynamique électro-acoustique.

5/They Might Be Giants Mammal (Elektra) Nous sommes en 1992, l’année choisie par la NASA pour être l’Année Internationale de l’Espace. Eh bien, figurez-vous que TMBG ont été choisis comme « musical ambassadors » de cet événement. Il faut dire que ces deux gars sont dingues de science. Leur album Apollo 18 est là pour en témoigner. Mammal est un hymne vibrant au monde des mammifères et aussi à la vie. La chauve-souris (le seul mammifère volant), le chat, le dauphin, le chien, le koala, l’ours etc… tous sont convoqués pour célébrer ce miracle : le sang qui coule à travers cette mystérieuse chambre à quatre alvéoles : le cœur. Petit clin d’œil à 2010, année européenne de la biodiversité.

6/Manitoba Mammals Vs. Reptiles (The Leaf Label)
La vie est combat, sélection. Ce petit hommage aux mammifères ne pouvait pas durer. Dans ce morceau, Dan Snaith (Manitoba est le projet d’un seul homme) nous rappelle à l’ordre. Face à nous, d’autres règnes, d’autres règnent. Ce morceau sent la confusion, la discorde. Il est issu de l’album Start breaking my heart (Electronica Album of the Year 2002 aux Canadian Independant Music Awards).
Pour Dan, les mathématiques coulent littéralement dans ses veines. Papa, maman sont mathématiciens de haut niveau. Il a choisi les arts, mais a malgré tout obtenu son PhD en mathematique en 2005. Son projet musical existe toujours mais a dû changer de nom : il était sous la menace d’un procès d’un certain Richard Manitoba (aka « Handsome Dick, demandez à Ingrid de traduire), le leader du groupe The Dictators. La réflexion de Dan est sans appel : c’est comme si The Smiths faisaient un procès à John Smith … ou quelque chose comme ça.

7/Propaganda Dr. Mabuse (ZTT) En 1984, quand ce hit frappe mon adolescence, je n’ai pas encore vu le film de Fritz Lang. Pourtant, l’étrangeté de la video, la nouveauté du son laisseront une empreinte forte sur la pâte à modeler de mon jeune esprit. 25 ans après, un détour par deux chefs d’œuvre du cinéma mettront dans un véritable four à pizza cette même pâte, beaucoup moins jeune. Dr. Mabuse, c’est l’homme qui, par la force de sa pensée, commande à toute la pègre de la ville. Ses apparitions fantomatiques étaient déjà un tour de force pour le cinéma (lui-même un dérivé de la science consacrée à l’étude du mouvement), mais l’homme a clairement dit « merde » à la science. Vendre son âme au diable : la tentation a toujours été grande. Propaganda propose une relecture de ce thème sous forme de perle-pop, qui n’a rien perdu de son éternelle jeunesse (un autre mythe : Faust, Dorian Gray, etc.)

8/Hᾰkan Libdo This looks infected, doesn’t it ? (Musick to play in the club) versus Iannis Xenakis Naama (Erato) interprété par l’Ensemble Xenakis dirigé par Huub Kerstens. Ici je vous propose une rencontre improbable : le mouvement syncopé de ma main va mêler la musique électronique de Hᾰkan Libdo à celle d’Iannis Xenakis.
Parlons d’abord du plus jeune : basé à Stockholm, ce grand monsieur de la musique électronique a publié plus de 250 projets (albums, singles, remixes, download, etc.) Il touche à tout et affiche un goût certain pour les pochettes trash. J’ai pris ce morceau pour son côté laboratoire, dangereux, expérimental. Il faut des gants en caoutchouc pour écouter ce truc. Sinon, ces sons vont attaquer vos oreilles. Il faut du Dettol, de l’Isobethadine (buccal ou pommade - je parle ici à nos nombreuses représentantes du monde pharmaceutique)…
Face à lui, Iannis Xenakis ; dont le morceau justement a été infecté par les sons du cadet. Naama signifie « flux » et est basé sur le son du clavecin. Je vous retranscris le commentaire du morceau en anglais (vous allez voir : c’est très facile à traduire mais pas à comprendre) : Naama calls for « periodic constructions thanks to a group of exahedric transformations and stochastic distributions ». On peut discuter après, à l’aide d’une petite bière, de la signification de tout ça.

9/Schaeben & Voss The World is Crazy (Jürgen Paape remix) (Kompakt) Leur label ne nous apprend pas grand-chose sur ce duo : Heiko Voss et Thomas Schaeben aime faire danser. Moi, ce qui m’intéresse, c’est le titre ! Le monde est devenu fou. La vitesse, l’expérimentation, la recherche effrénée de la rentabilité… Le son pulse ! Une nappe de synthé s’installe, votre pied commence son rôle d’échauffement métronomique. Vous voulez danser mais vous vous rappelez que vous êtes à une chambre d’écoute. C’est ça le son Kompakt ! [2]Il faut ralentir. Un changement de paradigme s’impose…

10/Headhunter Paradigm Shift (Tempa) Ce morceau est à la base du thème de cette nouvelle chambre d’écoute. J’emprunte le titre au livre de Thomas Khun Les structures des révolutions scientifiques. Pour Khun, une théorie est vraie durant un certain laps de temps. Après un changement des mentalités et des façons de voir (qu’il nomme lui un Paradigme), on change les critères du vrai. Ce disque du jeune Headhunter (de Bristol) se nomme Nomad et a été enregistré dans différentes villes où on l’invitait. Les autres titres du CD sont aussi largement inspirés par la science : Lifeform, Prototype, Technopolis, Physics Impulse, etc… Headhunter est-il un lecteur de Khun ? J’aime croire à cette hypothèse… La musique Dubstep inspiré par la littérature scientifique, que demander de mieux à un gamin qui pourrait être mon fils.

11/Twisted Science Theme from slow (Lo recording productions) Sur le site de Lo Rec, on trouve peu d’infos sur cet artiste. Les gens de Lo décrivent leur label comme étant « providers of fine esoteric music since 1995 ». Et c’est vrai que le label est très respecté (même si confidentiel). Graphiquement, les pochettes valent le détour. Ce Cd, acheté en soldes, n’a jamais vraiment été écouté par mes oreilles pourtant curieuses. Il est assez indigeste. Grâce à vous, grâce au nom du projet (Twisted Science, je ne pouvais pas au moins essayer), je suis tombé sur cette petite perle : cette ode à la lenteur qui est pour moi une invitation à observer les phénomènes (la poignée de sable de la citation de Gombrowicz…). Les chambres d’écoute sont un véhicule de décroissance et de redécouverte de ce qu’on a chez soi…





[1] J’emprunte cette belle expression à Witold Gombrowicz, dans son Cosmos, Denoël, 1966.
[2] Il est possible d’aller danser à Cologne en ma compagnie quelques fois par an. A vélo, en train ou en voiture : rejoignez le KKTB (Kölnischer Kunst & Tanz Betrieb, une émanation enthousiaste des Chambres d’écoute).